12/31/2008

2009 : 30ème anniversaire de la béatification du Père Jacques-Désiré Laval


70 ans de sacerdoce du Cardinal Margéot

17 décembre à Bonne-Terre

La lecture du 14 décembre que nous reprenons le 17 pour l’action de grâce des 70 ans du cardinal est souvent entendue pour les ordinations, mais il est toujours bon de la relire avec les yeux du cœur! Ne pouvons-nous pas en ce jour d’anniversaire, autour des 12 prêtres qui concélèbrent, nous adresser directement à notre bien-aimé cardinal et lui dire: «L’ Esprit du Seigneur est sur toi, Il t’a consacré par l’onction. Depuis 70 ans, l’Esprit t’envoie porter la bonne nouvelle…Il t’envoie guérir ceux et celles qui ont le cœur brisé... annoncer aux captifs la liberté…annoncer une année de bienfait» (Isaïe, 61,1-2)

Le père Margéot, devenu évêque puis cardinal, vit de cette onction jusqu’à la fin de sa vie. Nous en sommes les témoins! Comme nous le disons à la fin de l’eucharistie en ce jour béni, nous vivons cette année de bienfaits accordée par le Seigneur, avec la joie d’avoir fêté quatre anniversaires, quatre messes d’action de grâces tout au long de cette année 2008 : le 3 février chez le cardinal pour ses 92 ans, le 4 mai à Flic-en-Flac pour ses 39 ans d’épiscopat, le 29 juin au Carmel pour ses 20 ans de cardinalat et le 17 décembre dans la chapelle des Filles de Marie pour ses 70 ans de sacerdoce!

Toute la famille de Bonne-Terre est réunie : les Filles de Marie, les résidents du foyer Le Flamboyant, les mamans de la Clairière avec leurs bébés, l’Action Familiale, les Equipes Notre-Dame, la Légion de Marie, le groupe de la Méditation, les amis de toujours, tous sont là pour honorer celui que nous aimons. Une ambiance joyeuse qui se termine chez le cardinal avec un délicieux déjeuner pour les prêtres, offert par un «veilleur» au cœur d’or, Jean-Paul Adam!

Notre «vieillard aux rides éternelles» est en forme, ne manquant pas de calculer combien de messes il a célébré dans sa vie…70 x 365 jours =25 550! «Qui dit mieux ?» aime-t-il nous dire! Lui qui a failli nous quitter il y a tout juste un an, suite à un grave accident cérébral le 18 décembre 2007. Mais nous ne sommes pas maître de la vie ni de la mort. Nous ne connaissons ni le jour ni l’heure. Tenons-nous prêts! Comme le dit Mgr Piat durant son homélie : Le cardinal n’a cessé de dire à ses prêtres qu’ils devaient se laisser aimer par Dieu, leurs amis, les fidèles et les confrères prêtres». Quel exemple nous avons devant nous… un être cher qui se laisse aimer jusqu’au bout par ses prêtres, par tous ceux qui l’entourent et qui l’accompagnent dans son «éternelle jeunesse»! Mon Dieu, merci!

Le sacerdoce est l’accomplissement du sacerdoce royal du peuple hébreu conféré par Melchitsedeq à Abraham: «Tu es prêtre à jamais selon l’ordre du roi Melchitsedeq» (Ps 109). Le Christ prêtre et roi va accomplir et mener le sacerdoce dans sa plénitude en faisant du prêtre un «autre Christ». C’est pourquoi, le sacrement de l’ordre (ordination sacerdotale) opère dans la personne qui le reçoit une modification ontologique. Cet état demande une unité intérieure et extérieure. Son être n’est plus le même. Il est autre pour témoigner du Tout Autre!

Le prêtre dès lors peut lier et délier, pardonner et réconcilier au nom du Seigneur, il peut rendre Jésus présent dans l’eucharistie, non par ses propres mérites mais par la grâce du sacrement qu’il a reçu. Le prêtre est un pasteur à la ressemblance du Bon Pasteur. Il est comme le Christ, tout à tous.

Le cardinal est la figure du prêtre accompli, analogiquement «un autre Christ» dans l’humilité et l’offrande de lui-même. Il sait très bien que ce n’est pas par la force du poignet, au sens propre et au figuré, qu’il a réussi, mais par sa capacité à accueillir la grâce sans résister. Il y a un très beau midrash des premiers temps du christianisme qui dit que la prière a pour résultat la grâce. «Prier, c’est comme donner un coup de marteau sur la pierre de notre cœur, 70 étincelles de grâce en jaillissent, à nous de les transformer en rayon de lumière». Le cœur de Jean Margéot est ainsi lumineux! Encore joyeux anniversaire, dans la grâce de renaître avec Jésus en cette fête de Noël !

Anne Facérias, La Vie Catholique

12/22/2008

2009 Celebrations in Normandy

Next year’s celebrations of the 30th anniversary of Père Laval’s beatification will be on Sunday 13th September 2009. On this occasion, the young people of Ivry La Bataille is organising a 20 kilometres’ walk from Ivry La Bataille (where Jacques Désiré Laval had his medical practice) to cover areas associated with Père Laval: Épieds, where his mother came from and where his religious mentor L’Abbé Létard was parish priest, Croth, where he lived as a child, and Saint André, where he had his first medical practice. This will be followed by a family social evening in the Town Hall at Ivry la Bataille. This will take place on Saturday, 12th September 2009. Mauritian pilgrims will then proceed to Louviers for the pilgrimage on Sunday.

If any young person is interested in joining their French counterparts on the walk, and if anybody is interested in the pilgrimage next year, visit the site on www.omat.org.uk or phone the Overseas Mauritians Aid Trust on 020 8696 9714.

12/19/2008

Cardinal Margéot

70 ans de sacerdoce

17 décembre 1938, loin de son pays natal, en la basilique de Saint-Jean-de-Latran, à Rome, le jeune Jean Margéot, alors âgé de 22 ans, s’engage comme prêtre pour le Diocèse de Port-Louis. Un engagement qui l’emmènera, d’abord comme prêtre puis comme premier évêque mauricien de notre diocèse, à modeler les contours de l’Eglise et de la société enracinées à Maurice.

Ses œuvres sont multiples : mise en place de l’Action familiale, alors que la population augmentait rapidement et que les autorités songeaient à des méthodes de contraception artificielles ; lancement des Equipes Notre-Dame, mouvement de spiritualité conjugale ; consolidation de l’Education catholique traditionnelle et travail à l’émergence d’un secteur technique…

Ses prises de positions sur des sujets d’actualité de société et d’Eglise - dans des lettres pastorales régulières et de haute facture – ont permis à l’ensemble de la population de garder les yeux rivés sur des repères inaltérables.

Sa présence remarquée lors des moments forts et durs à la fois – l’enclenchement du processus de décolonisation, le passage du pays à l’indépendance et les émeutes de 1998 – et ses prises de position empreintes de sagesse ont toujours eu un effet apaisant.

Ses intuitions fortes, entre autres, l’absolue nécessité de collaboration pour les Eglises de la région, ont abouti à la Conférence épiscopale de l’océan Indien et font de lui un précurseur.

Prêtre dynamique, Jean Margéot est nommé le 6 février 1969 évêque du Diocèse de Port-Louis. Sa devise épiscopale - «Je suis venu pour servir et non pour être servi» - en dit long sur ce qu’Il se donne comme mission. Et le 28 juin1988, lors d’un consistoire, le pape Jean-Paul II l’élève au rang de Cardinal. Le 15 mars 1993, Jean-Paul II agrée à sa demande de se retirer comme évêque de Port-Louis; son coadjuteur, Mgr Maurice E. Piat prend sa relève.

Souffrant depuis quelques années, le cardinal Margéot, aujourd’hui âgé de 92 ans, a connu, il y a tout juste une année, un deuxième accident cérébral. Mais avec sa volonté habituelle et son grand courage, il a surmonté l’épreuve. Sa santé, depuis quelques semaines, est plutôt mieux malgré le poids de l’âge.

Aujourd’hui, dans le cadre de son 70e anniversaire de sacerdoce, nous ne pouvons que lui réitérer toute notre reconnaissance, lui souhaiter une meilleure santé et le garder dans nos prières.

La Vie Catholique

12/02/2008

Le Bienheureux Jacques Laval et l’île Maurice

Nous vous offrons, dans les messages ci-après, un véritable pèlerinage. Nous allons mettre nos pas dans les traces d’un missionnaire spiritain qui par sa vie de sainteté a changé les cœurs, les institutions et la vie de son peuple d’adoption : le Bienheureux Jacques Laval à l’île Maurice !

Rappelons les étapes de sa vie même si c’est surtout dans la dernière qu’il a réalisé le meilleur de sa vocation de missionnaire spiritain. Né en Normandie, en 1804, il devient médecin de campagne avec tout ce que ce métier exigeait alors de dévouement et de sacrifice.

En 1835, il se sent appelé à être prêtre. Il entre au séminaire sulpicien d’Issy-Les-Moulineaux où il fera la connaissance de bien des courants spirituels, parmi lesquels les missionnaires pour les pays pauvres.

Nommé curé de campagne, il cherchera encore à mieux servir les plus pauvres. Il accepte la proposition de séminaristes des îles de l’océan Indien où l’esclavage a fait beaucoup de ravages sur les conditions de vie des plus pauvres. Il s’affilie au projet en préparation de l’Œuvre des Noirs et part avec l’évêque du lieu, en 1841, sans avoir fait son noviciat.

Il reste 24 ans à l’île Maurice sans jamais revenir en France et en menant une vie des plus héroïques. Nous pouvons le considérer, avant la lettre, comme le curé d’Ars des îles, aussi bien dans sa vie de privations que dans sa vie de prière et dans son apostolat, avec son attention particulière à la formation des laïcs et au ministère de la réconciliation.

Les messages qui suivent vous diront le profond souvenir qu’il a laissé et toute l’œuvre qu’il y a réalisée. À partir de son tombeau, devenu centre de grand pèlerinage, rayonne un souffle qui a soulevé la vie de ce pays. Tous les obstacles à une vie plus humaine et plus spirituelle ont pu être surmontés. La simplicité de sa vie et de sa prière a mobilisé les cœurs vers des objectifs qui paraissent ailleurs encore impossibles. Il est invoqué comme Père Laval, mais il est le Bienheureux Jacques Laval, le premier béatifié par Jean-Paul II en 1979 et le premier bienheureux spiritain.

P. Jean Savoie , Revue Saint-Joseph

Paix et fraternité


Tout au long de l’histoire de l’Église, l’Esprit Saint a suscité des champions de la paix et de la fraternité. Parmi eux figure Jacques Laval, spiritain, apôtre de l’île Maurice au XIX e siècle.

Ce qui me frappe, c’est l’actualité du P. Laval. Nous connaissons les grands problèmes de notre monde : l’éducation, la famille, le racisme, l’absence de culture religieuse, la précarité et la pauvreté, l’interculturel et l’interreligieux. Ce sont autant de questions que Jacques Laval a prises à bras le corps.

Spiritain mauricien, évêque de Port-Louis, M gr Maurice Piat souligne que le P. Laval « s’est investi pour partager sa foi autant que pour le développement humain des familles dans tous les quartiers […] Il a su très fort épouser le sort des esclaves libérés sans écarter les autres ». « Apôtre de tous les rangs, de toutes les classes », dit l’un de ses contemporains. Jacques Laval, un prêtre si totalement donné au peuple de Maurice qu’on le croyait mauricien. « Il a marqué Maurice parce que les gens se sont sentis aimés », dit encore l’évêque qui rappelle les deux intuitions du P. Laval : pour avoir de bons enfants, il faut de bons parents ; pour annoncer l’Évangile, faire confiance aux laïcs, surtout aux femmes catéchistes (qu’il formait soigneusement).

Jacques Laval, un grand priant, (comme le curé d’Ars, son contemporain), répondant à la soif d’écoute et de réconciliation, libérateur de tout un ensemble de peurs.Impressionnants, les témoignages qui disent la confiance sans bornes dont jouit le Bienheureux, « l’homme qui a eu le courage de combattre les forces du mal, malgré toutes les pressions contre lui. » N’allons pas parler trop vite de superstition, de bondieuserie !Recevons l’avis de Floryse : « La dévotion populaire s’exprime en gestes. […] Cette dévotion aide les gens à s’accrocher à quelqu’un de plus grand qu’eux et qui leur fait du bien. » Pour sa part, le P. Zimmermann dit : « Cette piété mérite respect », même si, bien entendu, il faut aller plus loin.

Tout aussi impressionnant, et souligné en plusieurs endroits, le rôle d’unificateur, de « ciment » joué par le P. Laval, par exemple : « L’influence du P. Laval sur Maurice […] conditionne notre avenir commun de respect mutuel et de solidarité pour les plus pauvres ». Dans le sillage de leur glorieux devancier, les spiritains se sont investis dans le dialogue interreligieux, parce que ce dialogue « est une des clefs de la paix sociale à l’île Maurice ».

Charles Distel
Echo de la Mission

Reportage à l'île Maurice

"Sans foi, il n’y a pas d’espérance, et sans espérance, il n’y a pas de force pour continuer à lutter pour un monde réconcilié. " (Ingrid Betancourt)

Le Père Laval trace la route aux spiritains de Maurice et de partout : vie en cohérence avec l’Évangile, vie centrée sur Dieu, source de paix et de pardon, priorité aux plus pauvres sans distinctions, accueil de tous et de chacun.

Une route de courage, de réconfort et d’espérance.

île Maurice, le souffle du Père Laval

"Le Père Laval a de son vivant, et plus encore depuis sa mort – sans cesse encore –, donné une leçon d’humilité, d’amour du prochain et de grandeur de l’homme. Sa présence à Maurice, son œuvre pendant sa vie, son souffle qui plane sur nous depuis sa mort terrestre ont toujours dépassé et dépassent encore toute idée de race, de religion et de couleur… »

M. Radha Krishna Ramphul, représentant permanent de Maurice à l’ONU, parlait en ces termes du Père Laval, le 6 avril 1976.

En 2008, de tels propos restent vrais. Et ce qui se vit autour du Père Laval, impressionnant.

Parti de France pour faire connaître Jésus-Christ aux Mauriciens à qui il a été envoyé, le premier missionnaire envoyé par le Père Libermann découvre vite qu’il lui faut partir de la situation des gens tels qu’ils sont et les amener de son mieux à une foi vivante. À commencer par les plus pauvres, ces anciens esclaves dont personne ne s’occupe.

Le Père Laval non seulement reconnaît leur dignité. Il leur apprend qu’ils sont enfants de Dieu comme tous les autres. Il se veut et se fait lui-même le signe que Dieu les aime, par sa parole, par ses gestes, par toute sa vie donnée.

Les auxiliaires qu’il engage dans sa mission deviennent ses bras, ses jambes, sa voix pour rendre ce Dieu proche.

Le Père Laval trace la route aux spiritains de Maurice et de partout : vie en cohérence avec l’Évangile, vie centrée sur Dieu, source de paix et de pardon, priorité aux plus pauvres sans distinctions, accueil de tous et de chacun.Une route de courage, de réconfort et d’espérance.

Reportage : Textes et photos Lucien Heitz & M. Robert
Pentecôte sur le monde, Novembre - Décembre 2008, N°842

Signe de la bonté même de Dieu


Port-Louis, Sainte-Croix. Des milliers de croyants de toutes races, professions et religions prient toute l’année auprès du Père Laval. Pourquoi viennent-ils ? Qu’attendent-ils de ce spiritain béatifié par Jean-Paul II en 1979 ?

Vendredi 11 juillet 2008, 13h. Plus de 70 personnes, hommes et femmes de toutes religions et de tous visages, entrent dans le caveau du Père Laval. Des mains tendues déposent des fleurs sur la châsse. Prière en silence d’abord. Puis animée par le P. Bernard Hym, en créole, à partir de la Parabole du Semeur. Une dame égrène ensuite une liste de noms de personnes qui ont demandé des prières. Avec leurs intentions : maladies, famille en souffrances, éloignements, avenir des enfants…
Arrive un homme, visage asiatique, des fleurs à la main. Il met une offrande dans le tronc et pose son bouquet sur la châsse. Puis, debout, digne, il prie aux côtés des autres. Une dame voyant les bouquets s’entasser vient en déplacer une partie, passe un coup de chiffon sur les parois de verre et ramasse les déchets de cire tombés des lumignons. Personne ne gêne personne. Un monsieur quitte sa chaise, met une offrande dans le tronc puis pose un long moment ses mains noueuses sur la châsse. Yeux fermés, il prie. L’assemblée reprend avec ferveur le Notre Père. Puis par 3 fois l’invocation « Père Laval, priez pour nous ! » Après la bénédiction, les mains se tendent encore vers le gisant, puis les gens repartent.

Mario vient de Port-Louis, tous les vendredis, en souvenir des réunions que le Père Laval a commencées de son temps les vendredis à 13 h. « J’ai travaillé auprès de M gr Piat , dit-il. Depuis 2 ans, je suis malade du diabète avec une plaie à ma jambe droite : ça me fait du bien de venir ici malgré la souffrance. En me levant le vendredi, je dis au Père Laval : “Donne-moi force et courage pour venir jusqu’à toi !” Et à chaque fois, je repars avec plus de foi et de confiance. »L’homme au visage asiatique est chinois. Il raconte en toute simplicité qu’il vient ici tous les vendredis ainsi que le 8 septembre pour la grande fête du Père Laval. « Je suis catholique et respecte cette tradition. J’offre des fleurs, j’allume 2 bougies, je prie pour les malades, ceux de ma famille et tous les autres. Je demande aussi la santé. En repartant, je rapporte les bougies chez moi pour que leur lumière continue d’éclairer ma maison et que les bienfaits du Père Laval se répandent sur toute ma famille. »

Des Réunionnais se retrouvent à la sortie. Hilda se fait leur porte-parole : « Si le voyage à Maurice ne prévoit pas de temps de prière auprès du Père Laval, nous ne venons pas ! »

Julienne vient ici prier toutes les semaines, d’abord pour son fils. « Il est à l’hôpital et vient d’être opéré , confie-t-elle, les yeux remplis de larmes. Son épouse est décédée 2 jours après avoir accouché d’un petit-fils dont je m’occupe maintenant. Nous avons dépensé beaucoup d’argent. Heureusement qu’une de mes filles peut m’envoyer de l’aide depuis la France. Je continue de venir ici en portant tout ce monde dans ma prière, ça me soulage presque physiquement. »

Dimanche 13 juillet 2008. Une foule de gens passent dans le caveau du Père Laval. Témoignages recueillis :M. Jean : « Le Père Laval est un grand saint qui guérit beaucoup de gens. Je souffre depuis des années d’une blessure au genou. Chaque fois que je viens prier ici, le Père Laval me soulage. Nous habitions à la campagne, mais venions déjà prier ici régulièrement. Maintenant que j’habite Sainte-Croix, je ne manque aucun dimanche. Mon fils a un problème au cœur. Comme tous les dimanches, j’ai apporté un bouquet de fleurs au Père Laval. Je le pose sur sa châsse en priant puis je le rapporte chez moi pour qu’il nous soulage, moi et mon genou, mon fils et son cœur. Et ça nous fait beaucoup de bien. »

Mme Daniela : « Je souffre de l’estomac. Les médecins parlent d’opération. Je n’en ai pas les moyens. Aujourd’hui, comme je viens de loin, j’ai apporté 2 mouchoirs et des fleurs. Je frotte les mouchoirs sur la châsse du Père Laval et les emporte chez moi. Quand j’ai trop mal, je les frotte sur mon corps, ça me fait du bien. Mon mari est décédé, il y a 2 ans. Je travaille pour vivre. Je confie aussi au Père Laval l’avenir de mes enfants de 14 et 20 ans. Je suis heureuse que mes parents m’aient habituée à venir ici. Je sais que je ne viens jamais pour rien. Je reçois toujours ce que j’attends du Père Laval. »

M. Gervais : « Si je ne peux pas venir ici un dimanche, j’ai du mal à passer la semaine, je ne comprends plus ce qui m’arrive. Il faut que je vienne ici demander la santé, la guérison et la solution aux problèmes de mes enfants. Je remercie le Père Laval parce qu’il me fait du bien. »

M. Douce : « Je viens prier ici 3 ou 4 fois la semaine. Santé, force, courage pour vivre, le Père Laval nous l’accorde à moi et à ma famille. Il est très efficace. Il guérit de nombreuses personnes, même des incroyants. Un infirmier souffrant d’un cancer de la peau avait promis de se convertir si le Père Laval le guérissait. Il est aujourd’hui un fervent disciple du Père Laval. »
Lisa et Jean, un jeune couple : « Nous venons comme beaucoup de jeunes tous les samedis et dimanches demander au Père Laval de veiller sur nous et nos familles. Des gens viennent parce qu’ils sont malades, d’autres pour se faire pardonner. Nous vérifions tous que le Père Laval écoute nos prières. »

M. Hensley, un ancien des JMJ de Cologne : « Le Père Laval a surtout fait du bien aux plus pauvres des Mauriciens de l’époque. Il a eu le courage de combattre les forces du mal malgré toutes les pressions contre lui. Depuis sa mort, les gens viennent le prier, d’abord par reconnaissance : un Blanc qui a fait tant de choses pour les Noirs est quelqu’un d’efficace. Il devient signe de la bonté même de Dieu. Les gens de toutes les religions croient qu’il peut tout faire pour eux aujourd’hui, comme il a su le faire hier pour leurs parents. Beaucoup viennent donc pour se faire guérir et demander sa grâce. »

Mme Rosemay : « Le Père Laval est un rassembleur aujourd’hui comme il l’a toujours été. À sa fête, en septembre, toute l’île de Maurice est là, autour de lui, avec des gens de partout. Des “autrement” croyants se tiennent aux carrefours des routes et offrent rafraîchissements et souhaits de paix aux pèlerins qui marchent vers Sainte-Croix : c’est un signe de la grâce que le Père Laval accorde à tout Maurice. Il n’y a que lui qui puisse faire ça chez nous. De plus en plus de gens viennent le prier. Il continue à faire des merveilles pour nous. »

M. Alas, 71 ans : « Je viens tous les dimanches et tous les vendredis, messe et visite du Père Laval. Je prie pour moi-même, pour la santé de ma famille. J’ai travaillé dans la distribution de l’eau. Aujourd’hui retraité, je souffre de l’estomac. Venir ici prier le Père Laval me fait du bien, me calme, m’apporte la paix et me permet de mieux vivre avec les autres. »

M. Georges, associé spiritain : « J’ai longtemps cru que le Père Laval dont on me parlait était un Mauricien, tellement ce qu’on disait de lui me paraissait impossible à être fait par un Blanc au bénéfice des Créoles et des Noirs de Maurice… »

10h30 : un motard, la trentaine, blouson de cuir, vient de poser son casque aux pieds du Père Laval. Main droite posée sur la châsse, il prie sans se préoccuper d’une équipe de jeunes qui, en face de lui, filment avec leur téléphone portable et leurs mini caméras. Un jeune couple achète 4 lumignons : 2 sont posés sur la châsse du Père Laval, 2 sont emportés à la maison « pour que la lumière du Père Laval continue à nous éclairer ! ».

Pendant la messe qui a rempli pour la 2 e fois l’église, le défilé des saris continue. Deux bus viennent de déverser des familles entières d’hindous. Fleurs et lumignons s’accumulent au-dessus et autour du Père Laval. Un monsieur, avant de poser son petit bouquet, en extrait des pétales de roses, les pose un instant sur la châsse puis les reprend et s’en va. Une dame, 40 ans, vient de poser un petit pull-over et 2 bougies sur la châsse. Elle prie en silence et reprend le tout. Un papa frotte sa main sur la châsse et caresse la tête de son enfant en murmurant sa prière. Il fait ensuite toucher la châsse à l’enfant et lui fait poser un lumignon allumé. Deux jeunes motards, casque à la main, viennent poser leur main droite sur la châsse et prient en silence, puis se frottent la main sur la tête et repartent en se parlant, décontractés.

Apôtre de toutes les classes

Entre 1841 et 1864, le 1er missionnaire de la Société du Saint-Cœur de Marie fondée par le P. Libermann transforme toute l’île Maurice par un long travail de régénération morale. Source de son action : une foi contagieuse.

Du pont du Tanjore, au soir du 13 septembre 1841, Jacques Laval, 38 ans, voit tous les pauvres de l’île Maurice auxquels il vient offrir sa vie.

Il meurt après 23 ans d’apostolat : 40 000 personnes le conduisent de la cathédrale à Sainte-Croix. Pour tous, il est le saint qui a su se trouver des auxiliaires, hommes et femmes à peine sortis de l’esclavage, avec lesquels il a merveilleusement transformé le paysage religieux de l’île.

En 1841, Maurice compte 140 000 hab. venus d’Europe, d’Afrique et de Madagascar, d’Inde, de Malaisie et de Chine. Catholiques, protestants, hindous, bouddhistes, musulmans cohabitent en 3 classes : les Blancs, les mulâtres et les esclaves et quelque 18 000 travailleurs indiens. Distinctions théoriquement abolies depuis que les Anglais ont émancipé les 47 000 derniers esclaves en 1839. Mais très vivantes dans les faits.Plus de 100 000 Mauriciens se disent alors catholiques : presque tous les Européens de souche française ainsi que l’immense majorité des hommes de couleur et des affranchis nés dans l’île. Mais peu vivent en chrétiens : moins d’1 baptisé sur 1 000 assiste à la messe.Né en Normandie en 1803, Jacques Laval est médecin durant 5 ans puis entre au séminaire Saint-Sulpice. Les pauvres sont sa vocation. Prêtre en 1838, il dessert Pinterville. En août 1840, Le Vavasseur et Tisserant, 2 séminaristes à Saint-Sulpice, lui parlent de l’Œuvre des Noirs. Il s’y intéresse. Mgr Collier, vicaire apostolique de l’île Maurice, propose à Le Vavasseur d’être l’évêque protecteur de l’œuvre naissante. Tisserant, prêtre, se présente. Quand M gr Collier lui conseille d’amener un compagnon, on pense à Laval. Tisserant sera retenu par l’archevêque de Paris. Laval s’embarque seul pour l’île Maurice. Sans noviciat ni préparation, il est le 1 er missionnaire de la Société du Saint-Cœur de Marie fondée par le P. Libermann.

Le P. Laval pensait devoir prêcher dans des campagnes immenses et inorganisées. Il voit vite cette méthode inadaptée face à Port-Louis où vivent 30 fois plus d’habitants et d’où le meilleur et le pire rayonnent sur l’ensemble du pays. Il y reste donc. Il contacte en 1er ceux qu’il voit chaque jour : les employés de l’église et du presbytère. Il s’assure facilement le concours d’Alphonse Lavoipierre, sacristain et secrétaire de la Fabrique, un jeune Blanc instruit, pieux et zélé. La plupart des autres employés, des affranchis, sont impressionnés par ce prêtre qui vient vers eux avec tant de respect et de cordialité. Leur confiance va être contagieuse.

Laval habite d’abord au presbytère. Les affranchis, si souvent repoussés, hésitent à y venir. Alors Laval fait construire un petit pavillon en bois dans la cour, avec un accès direct sur la rue. Le centre de la Mission des Noirs. Il s’en réserve le tiers pour sa chambre. Le reste, décoré d’images pieuses et meublé de bancs, sert de salle de catéchisme ouverte à tous ceux qui veulent lui parler, apprendre leurs prières, se préparer aux sacrements. De 9 h à 16 h, des Noirs y viennent un à un ou par petits groupes. À 19 h, la prière. Un catéchisme suit jusqu’à 21 h 30 ou 22 h. L’assistance augmente si rapidement qu’il faut passer du pavillon à la sacristie, puis à l’église même, d’abord sous les cloches puis dans la nef. En 1841, en plus du gin importé, 6 millions de litres de rhum ou d’arack se boivent annuellement à Maurice. Les cas de delirium tremens sont nombreux.

À Pinterville, Laval avait constaté que la formation religieuse donnée aux enfants était ruinée par les mauvais exemples des parents. « Faites de bons parents et vous aurez de bons enfants » sera sa ligne de conduite à Maurice.Un jeune homme estropié des 2 jambes marche sur les mains et les genoux. Laval le forme et, en avril 1843, l’établit catéchiste. Succès. Il choisit alors des hommes et des femmes qui, leur journée de travail terminée, enseignent bénévolement les catéchumènes de leur quartier à l’aide, quand ils savent lire, d’un petit catéchisme qu’il a rédigé en créole. À Port-Louis, il confie les malades et les vieillards aux conseillères les plus dévouées et les plus instruites.

Pendant 20 ans, Ma Céleste (Marie-Célestine Henry) secourt ainsi avec patience et bonté plusieurs milliers de malades. Fin 1844, les Noirs pratiquants sont passés de 20 à 3 000. Une grande fermentation naît dans la population. Laval s’est mis à l’école des affranchis, étudie leurs tournures de langage, leurs coutumes, écrit et retouche ses catéchismes avec le plus grand soin. Il a le don de transformer ses catéchumènes en apôtres. Il bénit les mariages le plus tôt qu’il le peut. C’est à la confession qu’il gagne les cœurs et forme les consciences.La régénération morale entreprise par le P. Laval porte ses fruits. Les réquisitoires des cours d’assises et les registres de la police signalent un décroissement sensible des crimes et délits. Les ex-apprentis ne boivent plus. Ils contribuent par leurs collectes au soulagement des pauvres et élèvent des chapelles à leurs propres frais dans les différents quartiers de l’île.

Le P. Laval étend son influence aux 3/4 de la population, Blancs et Noirs confondus. Les Sœurs du Bon Secours ouvrent une école et un hôpital dans les quartiers pauvres de Port-Louis, une école et une léproserie à Pamplemousses. Au plus fort d’une épidémie, 20 Blancs fondent à Port-Louis une Conférence de Saint-Vincent-de-Paul et modèlent leurs activités sur celles des Noirs qui, depuis des années, gèrent la Caisse des pauvres. Sur le conseil du Père Laval, ils ouvrent et soutiennent des écoles destinées aux enfants pauvres. Une orientation qui vaut à l’Église un grand rayonnement et marque le vrai départ de l’enseignement diocésain.Quand, à partir de 1846, le gouvernement britannique permet l’arrivée de confrères, aucun ne mettra en cause la pastorale de Laval. Dans les campagnes, il multiplie les chapelles. Fin 1847, 20 chapelles animées par un ou une catéchiste fonctionnent. 40, un an plus tard… Des petites communautés qui se développent les agrandissent ou les reconstruisent. Certaines deviennent des églises capables d’accueillir 2 000 fidèles.

Laval meurt le 9 septembre 1864. La situation religieuse de l’île Maurice est méconnaissable. Les anciens esclaves forment une chrétienté fervente. Les Libres ont rejoint le giron de l’Église qui les avait baptisés. Quant aux Blancs qui, par leur voltairianisme et leur libertinage, avaient été le principal obstacle à la conversion des Noirs, ils ont été eux-mêmes convertis, moins par l’éloquence d’un prédicateur que par l’étonnant changement de vie de leurs domestiques, voire de leurs maîtresses.Pour l’abbé Masuy, qui, ne s’est consacré qu’aux Blancs, le Père Laval « a été l’apôtre de tous les rangs, de toutes les classes : il a tout relevé ».

D’après Le Père Jacques Laval, le saint de l’île Maurice
Père Joseph Michel, éditions Beauchesne, Paris, 1988

La Caisse des pauvres

Le Père Laval a appris à ses chrétiens à aider leurs frères dans le besoin. Jusqu’aux Irlandais décimés par la famine. Leur moyen : la Caisse des pauvres, alimentée par une quête dominicale aux offices des Noirs, par les offrandes faites aux mariages et par des dons. Conseillers et conseillères reçoivent les appels au secours et s’assurent qu’ils sont justifiés. Au début du mois, réunion avec le Père Laval : le trésorier fait les comptes, les conseillers et visiteuses de malades présentent les appels reçus, les distributions se décident en commun. La caisse prend aussi en charge des vieillards ou infirmes sans moyens. D’un conseil à l’autre, le trésorier a la liberté de répondre aux urgences : il peut par exemple fournir un cercueil en bois blanc pour l’enterrement d’un pauvre.

D’après Le Père Jacques Laval, le Saint de l’île Maurice,P. Joseph Michel, éditions Beauchesne, Paris, 1988.

La Sainte-Croix


Vers 1845, des gens aisés de Port-Louis ont leur maison de campagne dans ce quartier peu peuplé de la Pairie.

Un Indien, Zamor Bongoût, originaire de Pondichéry, arrivé comme esclave à Maurice, puis affranchi, bon restaurateur et converti au christianisme, veut remercier Dieu de sa conversion et de son succès. En 1848, il construit une chapelle sur ses terres. Le Père Laval l’appelle la Sainte-Croix.

Bénie par Mgr Collier, le 18 juin 1848, agrandie, détruite par un cyclone, reconstruite (1 500 places) en 1901, détruite en 1960 par le cyclone Carol, rasée en 1965…

Le 23 mai 1968, Mgr Margeot bénit l’église actuelle conçue par l’architecte Pierre Desmarais. À côté de l’église, le caveau du Père Laval (1803 – 1864).

Toutes races, professions, religions confondues, des milliers de croyants prient toute l’année auprès de lui. Les 8 et 9 septembre, plus de 150 000 personnes viennent le prier.

Le 29 avril 1979, il est béatifié par Jean-Paul II qui met alors son pontificat sous sa protection.

Prière au Père Laval

"Tous enfants d’un même Père, nous voici auprès de vous, pleins d’amour et pleins d’espoir, Père Laval, priez pour nous !
Tout un peuple ici se presse reconnaissant. Nous vous portons nos misères, nos projets et nos espoirs, nos prières et nos devoirs et la détresse des vieillards abandonnés. Nous vous portons la conscience de ce peuple mauricien pour qu’il garde encore confiance en son destin. »

Ce cantique au Bienheureux Père Laval a été composé en 1979 pour sa béatification par Jean-Claude Alleaume (Grand-Gaube). Des milliers de voix le reprennent depuis, surtout lors des célébrations des 7 et 8 septembre, anniversaire de la mort du Père Laval.

La prière officielle de la messe du Bienheureux résume ce qu’a été la mission de l’apôtre Jacques Désiré Laval : « Proclamer que tous les hommes sont frères, les libérer de leur haine et les affranchir de leurs égoïsmes . » Par la prière de l’apôtre de l’unité mauricienne, l’Église demande à Dieu « l’unité dans la diversité et la paix dans le respect mutuel ». Pour qu’elle ait la force de continuer la mission du Père Laval.

Libérateur de tant de peurs


Floryse Chue-Wai-Leung travaille dans la paroisse Sainte-Croix et auprès d’enfants à problèmes. « Rivée au Père Laval » depuis son enfance, elle explique comment il est le ciment de toutes les cultures.

La dévotion populaire s’exprime en gestes. Derrière ces gestes, il y a une continuation de la tradition et de ses coutumes, un amour du sacré, mais surtout une recherche de l’essentiel. Cette dévotion aide les gens à s’accrocher à quelqu’un de plus grand qu’eux et qui leur fait du bien. « L’essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien qu’avec son cœur ! » disait Saint-Exupéry. J’aime beaucoup cette parole. Elle m’aide à ne pas mal juger ces gestes et celles et ceux qui les font autour du Père Laval. Même si les gens font des mélanges entre cultures et religion et entre religions. Il faut un long cheminement pour arriver à voir un peu plus clair dans toutes ces démarches.

Mon papa était chinois. Il a fait ici son chemin vers le baptême. Ma maman, créole. Ils aimaient beaucoup le Père Laval. Comme le font aujourd’hui encore les commerçants chinois les dimanches après-midi, mes parents allaient régulièrement prier « leur ancêtre dans la foi ». C’est ainsi qu’ils appelaient le Père Laval.

Pour les malades, le Père Laval qui a lui-même beaucoup souffert, qui a soigné comme médecin et comme prêtre, est reconnu comme un grand guérisseur. Beaucoup de gens se reconnaissent guéris par sa prière : rémissions de cancers, cas déclarés perdus par les médecins et qui se retrouvent guéris… C’est ce qui pousse de nombreux parents à venir présenter leurs enfants à problèmes au Père Laval. N’oubliez pas qu’il a aussi et avant tout été un priant comme le curé d’Ars.

J’ai vécu le transfert de ses restes de l’ancien au nouveau caveau en présence d’une foule incroyable.

Le Père Laval est le ciment de toutes les cultures de Maurice. Cela se sent discrètement toute l’année. Mais devient plus perceptible en septembre qui est devenu le mois du Père Laval autour de sa fête des 8 et 9. Quand les Mauriciens voient défiler ainsi des milliers de croyants de toutes religions et cultures, on sent comme des tensions qui se calment. Ce qui est important pour les Mauriciens, c’est ce qui est intérieur. Les gens ne s’expriment pas par des mots. Les communautés ont leurs caractéristiques. Mais les mêmes gestes expriment des valeurs communes reconnues par tous. Une femme hindoue viendra chercher une guérison auprès du Père Laval. Elle dira simplement : « Je suis venue parler au Père Laval de mon problème ! » La mentalité insulaire reste très forte ici.

Quand je parle aux jeunes du Père Laval, je leur rappelle son image le présentant montrant le Christ en croix. Je leur fais comprendre aussi que notre corps humain a la forme d’une croix. Ils font alors facilement le lien entre ce qu’a réalisé le Père Laval de son temps et ce qu’ils sont appelés à faire aujourd’hui de leur vie.

Il nous faut tout faire pour que l’influence du Père Laval sur Maurice continue. Elle conditionne notre avenir commun de respect mutuel et de solidarité pour les plus pauvres.

L’engagement du Père Laval pour le développement de la société par des familles vraies, son souci caritatif perpétuel, son sens de la dignité des plus pauvres, tout ça a aujourd’hui encore une grande influence jusque dans le monde politique. C’est un peu comme les idées d’un Gandhi qui marquent les comportements, souvent sans beaucoup de paroles. Cela s’est vérifié lors de la béatification du Père Laval par Jean-Paul II qui avait placé son ministère de pape sous la protection du 1er saint qu’il allait béatifier.

Une attention vraie aux plus pauvres


Mauricien et spiritain, Mgr Maurice Piat, évêque de Port-Louis depuis 1993, explique pourquoi et comment le Père Laval reste un homme à suivre.

Comment avez-vous appris à connaître le Père Laval ?

Enfant, mes parents m’emmenaient à Sainte-Croix pour la fête du Père Laval, les 8 et 9 septembre. Nous allions régulièrement à l’ancien caveau et à la vieille église détruite par le cyclone. Quand vers 15-16 ans, j’ai pensé à devenir prêtre, la figure du Père Laval s’est imposée à moi. J’ai parlé de lui dans ma lettre de demande d’admission dans la congrégation. Il n’était pas pour moi d’abord un thaumaturge, mais une figure de père dans la foi. Ma famille m’a révélé aussi des liens entre elle et lui. Ma famille conserve une lettre du Père Laval dans laquelle il demande à mon arrière-grand-père du bois pour construire une chapelle. Le P. Joseph Michel place dans la liste des membres de la 1re Conférence de St-Vincent-de-Paul, Alfred Kœnig, un autre de mes grands-pères. Ces liens avec le Père Laval m’ont beaucoup touché.

Comment le Père Laval a-t-il marqué aussi fortement les Mauriciens ?

Le Père Laval a marqué Maurice parce que les gens se sont sentis très aimés. Il a su refusé la « gran’case » des bourgeois et ouvrir son petit bureau au bord de la route pour que le plus pauvre se sente à l’aise en face de lui. Il s’est investi pour partager sa foi autant que pour le développement humain des familles dans tous les quartiers. Il s’est mouillé, lui-même avec nombre d’autres, dans le soin des mourants au cours des 2 épidémies de choléra. Les gens ont ainsi vu un missionnaire qui s’est vraiment mêlé à la pâte humaine. Il a su très fort épouser le sort des esclaves libérés sans écarter les autres. Son engagement a eu un effet d’entraînement sur les religieuses et sur bien d’autres. Il a voulu atteindre le plus rapidement le plus de monde possible pour faire le bien en grand.

Ses façons de faire restent-elles utiles pour une pastorale d’aujourd’hui ?

Sa 1re intuition a été son exigence pour qu’existent des familles stables. Partout, aussi bien dans les familles des ex-esclaves que dans les autres, le relâchement était très fort. Il ne cessait de répéter que pour avoir de bons enfants, il faut de bons parents. Cette exigence reste d’actualité.Mgr Margeot avait déjà insisté sur cette stabilité. Elle reste plus que jamais nécessaire aujourd’hui.
Sa 2e intuition a été sa grande confiance aux laïcs, surtout aux femmes catéchistes, aux conseilleuses. Sa façon d’appeler et de former les laïcs a fait rayonner son apostolat autour de ses chapelles.
Il a aussi beaucoup catéchisé les adultes, avant et après le baptême. Cela aussi reste d’une grande actualité. Pas de transmission de la foi sans parents qui s’y engagent. Le Père Laval a su mettre sur pied des noyaux de gens responsables. Nous en avons encore besoin aujourd’hui. L’accompagnement de chacun par l’écoute et la confession aura marqué l’apostolat du Père Laval. Nous constatons aujourd’hui une même soif d’écoute et de réconciliation.

Que dirait le Père Laval aux Mauriciens d’aujourd’hui ?

Je crois qu’il nous dirait : porter une attention privilégiée aux plus pauvres ne divise pas un peuple mais l’unifie. Lui s’est préoccupé en priorité des pauvres, c’est sa grande intuition. Si aujourd’hui toutes les classes sociales se retrouvent autour de lui, c’est pour ça.Les pauvres le lui ont d’ailleurs bien rendu. L’attention authentique portée aux plus pauvres crée un vrai courant d’unité dans un peuple. Enfin sur la photo que nous connaissons de lui, le Père Laval montre le Christ en croix comme seule source de salut pour l’humanité. Ce message vaut aujourd’hui encore pour tout Maurice.

Les spiritains continuent-ils la mission du Père Laval ?

Le Père Laval a manifesté un grand dynamisme pour les plus pauvres et les plus éloignés de l’Église, baptisés ou non. La tentation est forte dans notre Église de rester entre soi. Laval est sorti des cadres pour aller vers ceux qui n’osaient pas aller vers l’Église. Ce serait une priorité pour les spiritains d’aller vers ceux qui ont soif d’être écoutés et épaulés et qui n’osent pas s’approcher de l’Église. Cette soif existe ici chez les Créoles mais aussi chez de nombreux autres qui attendent respect, formation humaine et spirituelle.

Un centre Père-Laval se lance. Qu’en attendez-vous ?

Qu’il soit un lieu d’accueil pour les pèlerins, mauriciens et autres, de toutes religions qui viennent prier le Père Laval à Sainte-Croix. Cet accueil répond à la soif de beaucoup de gens. Qu’il permette aussi de mettre des laïcs debout pour un meilleur service dans l’Église et la société. Je crois que ce service des spiritains permettra de faire connaître un Père Laval missionnaire de l’Évangile et pas seulement thaumaturge. Un missionnaire qui rappelle à chacune et à chacun son rôle de chrétien dans notre monde.

Apaiser la soif d’un peuple


Faire le plus grand bien au plus grand nombre possible de gens. Cette volonté du Père Laval, les spiritains de l’île Maurice la font leur. Ils ouvrent à côté de la paroisse Sainte-Croix à Port-Louis un centre Laval. Explications.

Chaque semaine, des milliers de pèlerins se rendent auprès du Père Laval. Ils sont de tous âges, de toutes religions, tant mauriciens que réunionnais, mais aussi des touristes, tout étonnés de voir qu’un homme mort depuis près de 150 ans peut encore attirer de telles foules.

« Aller prier auprès du Père Laval est un recours qui apporte beaucoup à beaucoup de gens. » Pour le Père Raymond Zimmermann, responsable des spiritains de l’île Maurice, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ doit rejoindre cette piété. « La religiosité populaire qui se développe ainsi autour du Père Laval depuis sa mort jusqu’à nos jours est à comprendre dans ce qu’elle exprime de la souffrance des gens. Cette piété mérite respect. Il nous faut partir de ses expressions pour proposer une rencontre avec Jésus-Christ. » C’est dans cette optique que les spiritains ont choisi d’ouvrir un centre spirituel à côté de la paroisse Sainte-Croix et du caveau du Père Laval.

« Les spiritains sont présents dans 7 paroisses, encadrent le pèlerinage du Père Laval et l’aumônerie d’un centre de réhabilitation de drogués et d’alcooliques. Ils servent partout un pays multiracial et multi-religieux , explique le Père Bernard Hym. À la suite du Père Laval, ils veulent aider à construire une cohésion sociale et religieuse, jamais gagnée d’avance, entre les différentes composantes de la société. Le centre de dialogue interreligieux ouvert à Pont-Praslin travaille en ce sens. Différents groupes y apprennent depuis des années à se connaître et à se respecter. Il n’est pas pensable d’abandonner un tel effort de dialogue interreligieux, qui est une des clefs de la paix sociale à l’île Maurice. »

Le centre Laval ouvert par les spiritains répond à 3 objectifs.

D’abord offrir aux nombreux pèlerins un lieu où ils peuvent crier leurs souffrances. Un lieu où ils sont écoutés d’une oreille attentive guidée par une volonté de les aider au mieux. Il faut pour cela des confrères qui savent écouter et soigner la souffrance du peuple, comme a su le faire le Père Laval de son temps. Une telle mission ne peut se vivre que par des hommes au cœur ouvert et disponible pour tous, attentifs à l’Esprit de Dieu.

S’inspirant des intuitions du Père Laval qui a su s’entourer de chrétiens laïcs (catéchistes, conseillers, conseillères…), les spiritains veulent proposer à des laïcs, à des religieuses et à des prêtres, une initiation à la spiritualité spiritaine de leurs fondateurs : Poullart et Libermann surtout. Mais aussi à la spiritualité vécue par quelques figures spiritaines tels M gr Shanahan, le Père Brottier et d’autres. Mais, insiste le P. Raymond, « en relisant toujours cette spiritualité avec les filtres adaptés à notre temps et aux réalités de nos îles ». Depuis 3 ans, une équipe pilote cette initiation spiritaine à partir du centre de Pont-Praslin. Entre 40 et 50 personnes y participent. Aujourd’hui, à la demande de beaucoup de gens, les spiritains veulent proposer des temps de retraites au centre Laval à Sainte-Croix. Pour qu’ils y trouvent dans les lignes de force de la spiritualité spiritaine les moyens de s’engager à la fois dans la lutte contre la misère de la majorité des gens et le dialogue interreligieux. Ce sont les 2 priorités que les spiritains s’efforcent de vivre.

« Dès à présent , affirme le P. Bernard, nous pouvons accueillir les gens et les écouter. Les bureaux sont fonctionnels. Nous aimerions aussi rénover l’expo sur la vie et l’œuvre du Père Laval pour qu’elle soit plus parlante. Il serait bon aussi de donner aux gens la possibilité de manger sur place. »

Enfin, vu les groupes de plus en plus nombreux qui se présentent, il reste à équiper le centre d’une grande salle de conférence, pour assurer une formation grand public, d’une hôtellerie d’une cinquantaine de 50 chambres et d’un oratoire.

Le Père Laval a toujours voulu faire le plus grand bien au plus grand nombre possible de gens. Pour la mise en œuvre de ce programme, les spiritains ont besoin de l’aide et du soutien de tous ceux qui s’intéressent à leur mission. À Maurice même, ils peuvent s’appuyer sur un groupe de personnes qui partagent leurs convictions. Mais pour donner corps à l’ensemble du projet, ils s’adressent à tous ceux qui peuvent les aider à le réaliser.

10/20/2008

Pèlerin ?

Depuis que l’homme, curieux de nature, se déplace à la recherche d’autres lieux, la caravane, le pèlerinage existent. Pour ce dernier, la quête de nouveauté n’est pas migratoire ou commerciale, mais d’ordre essentiellement spirituelle. Du pèlerinage, on espère un renouveau, une découverte, récompense d’un effort, d’un don de soi à la fois physique et financier, en même temps que le réconfort d’une fraternité en action sur les routes qui mènent vers cette « autre chose »…

Ces itinéraires, aujourd’hui sécurisés, furent jadis des entreprises aventureuses, qui nécessitaient de se grouper pour mieux faire face à des bandes de brigands redoutées. Du mot latin « pelegrinus », puis « peregrinus », étranger voyageur, l’on a fait « pèlerin » qui prit le sens religieux que nous lui connaissons. Les différents cultes religieux réglementent l’obligation du pèlerinage pour tout fidèle, qui doit rendre hommage à la divinité et payer de sa personne – gagner des indulgences, disait-on au Moyen Age… Naturellement, ces lieux de pèlerinage sont des sites extraordinaires, inscrits dans la mémoire collective pour avoir été illuminés par des prodiges, des apparitions, ou sanctifiés par le sang des martyrs persécutés au cours de l’Histoire…

L’expression « pèlerinage aux sources » remonte en fait à une pratique antérieure au christianisme ; liée parfois à des légendes où la « source » jaillie de « dessous terre » passait pour avoir des vertus de purification et de guérison. Il en est resté cet usage d’« aller prendre les eaux » dans des stations thermales pour des raisons similaires. L’eau pure, sortie du ventre de la terre, aide à guérir en de nombreux endroits, reconnus par le corps médical, (Vichy, Forges-les-eaux, Vittel, Plombières, etc. pour n’en citer que quelques-unes en France).

Cependant, le pèlerin va se ressourcer là où il espère, soit une guérison, soit un regain de vitalité spirituelle. Pratique déjà vivace chez les Hébreux, la Loi juive imposant obligation au chrétien d’accomplir chaque année trois pèlerinages à Jérusalem. On sait, d’autre part, la vénération que suscitent les sources du Gange, lieu visité par les Hindous…

Ces sanctuaires, dont le renom s’est étendu « urbi et orbi », attirent au Moyen Age des foules considérables, à la fois curieuses et pénétrées d’une foi profonde. Ce fut l’époque où Dieu se mêlait au plus près des affaires des hommes… Milliers de marcheurs, accompagnés ou non de gardes armés pour dissuader les malandrins, détrousseurs de convois, en route vers une lumière, une espérance, la foi en marche. Du temple de Salomon, on en arrive aux grands lieux dont des guérisons « miraculeuses » assurent la réputation. Propice, l’époque de la Pâque, avec ses routes moins froides et plus sèches. Sont exclus de ces randonnées périlleuses enfants, femmes, vieillards et impotents, car les chariots sont déjà bien chargés… Ainsi que bœufs et chevaux. L’important n’est pas d’aller vite – comment le pourrait-on ? – mais de parvenir au but. Cela peut durer des semaines, des mois… En route, on troque, on demande la charité, les dons permettent de poursuivre…

Et beaucoup n’en reviendront pas : fatigue excessive, épidémies, désertions pour… ailleurs.

Curieusement, en notre époque moderne, la pratique du pèlerinage, assez oubliée ces derniers siècles (guerres, révolutions, progression de l’athéisme…) revient par d’autres portes : goût du voyage, sûreté des routes, recours médicaux en cas de nécessité…Mais aussi hommage à l’audace sacrée de ces gens qui n’hésitaient pas à « tout laisser » pour partir vers l’incertain, confiés à Dieu et à la Vierge Marie. Mais, aujourd’hui encore, on part en pèlerinage pour obtenir une guérison ou remercier d’une prière exaucée : retour d’un fils parti à la guerre, aide spirituelle, et toujours des guérisons inexpliquées par la médecine… Annuellement, on compte cinquante millions de pèlerins qui visitent les différents sanctuaires français, dont certains sont mondialement fréquentés : le Mont Saint-Michel, Lourdes, Lisieux, Chartres, la Vierge Noire du Puy-en-Velay, Sainte-Catherine Labouré, rue du Bac à Paris, chère aux Mauriciens, (comme aussi le village de Pinterville, près de Louviers, où le Père Laval commença son apostolat). Rocamadour, situé dans le Lot, où l’on prie une Vierge Noire, et qui est aussi un site magnifique et sauvage… Bien d’autres encore.

L’un des plus célèbres reste, en Espagne, Saint-Jacques de Compostelle, qui fut jadis une marche héroïque venue de différents points d’Europe. La Tradition dit que Jacques, proche de Jésus – (l’exégèse moderne a établi qu’il était son frère) – aurait débarqué en Espagne, évangélisé l’Andalousie. Un « Guide des Jacquets » facilitait le voyage du pèlerin médiéval, muni du bâton et de la coquille Saint-Jacques…

Notre année 2008 fête le 1 300ème anniversaire du pèlerinage au Mont Saint-Michel, cette « merveille de l’Occident, au péril de la mer »… Avec trois millions de visiteurs par an, c’est l’un des sites les plus visités de France…

Michel BEDU, L'express Dimanche

9/29/2008

IL Y A 25 ANS - 22 SEPTEMBRE 1983

Miracle Père Laval ? Elle y croit. L’Eglise et la médecine, non

Date chère au cœur de l’île Maurice que celle du 9 septembre, jour anniversaire, non de la naissance, comme le croient certains journalistes, mais de la mort de Jacques Désiré Laval. Les pèlerins accourent par milliers de partout, des quatre coins de Maurice mais aussi d’ailleurs. En septembre 1983, notre presse indépendante donne la parole à Mme Marthe du Mesgnil d’Engente, une Française, établie de longue date à Madagascar, parce que depuis 1973, sinon avant, elle revient régulièrement prier et rendre grâces à Dieu, à Sainte-Croix, à l’occasion de la commémoration nationale ou presque, et même politisée et récupérée depuis peu, de la mort de ce Bienheureux. Elle explique le pourquoi de cette fidélité toute lavalienne.

Au moment où notre île accède enfin à l’Indépendance politique, une méningite aiguë tient clouée au lit Mme Marthe du Mesgnil d’Engente, Paralysée même, sinon crucifiée car, alitée sur un lit d’hôpital à Antananarivo, elle ne peut remuer pas plus le petit doigt que le gros orteil. Ses médecins sont formels : elle ne retrouvera jamais l’usage de ses membres. Deux ans se passent et elle demeure toujours prostrée. Pas la moindre indication d’une possible amélioration de son état de santé. Une amie, en partance pour Maurice, promet d’aller se recueillir, à sa place, au tombeau de notre Père Laval et de lui rapporter une image de l’Apôtre de Maurice, ainsi qu’une prière réclamant son intercession. De retour dans la capitale malgache, elle rend compte de sa mission à Marthe du Mesgnil d’Engente. Celle-ci multiplie les neuvaines au Père Laval. Un beau jour, le miracle se produit mais progressivement. Elle commence par pouvoir remuer ses membres les uns après les autres, parvient à se redresser sur son séant. Elle recommence bientôt à marcher.

Elle croit, dur comme fer, qu’elle doit sa guérison au seul bon Père Laval. Ses médecins en sont moins convaincus. Ils parlent, à juste titre, de traitement, faisant son effet plus tardivement que prévu, des... miracles de l’infrarouge. L’Eglise partage l’avis de la Faculté. Elle ne croit au miracle qu’en cas de guérison complète, absolument spontanée, et totalement inexplicable par la science médicale. Exemple : la guérison de l’anglican Edgar Beaubois, le 17 juillet 1923, au caveau du Père Laval. L’Eglise ne reconnaît officiellement qu’une soixantaine de miracles à... Massabielle. C’est le cas de le dire : en matière de miracle, elle a la main plutôt lourde. Elle a cent fois raison.

Il en faut davantage pour refroidir Marthe du Mesgnil d’Engente. Reconnaissante, elle revient, chaque 9 septembre, remercier son Bon Père Laval, de lui avoir rendu bras et jambes et surtout la possibilité de reprendre assidûment ses œuvres caritatives. Si elle est française, elle vit à Madagascar depuis son enfance et parle le malgache mieux que les autochtones. Elle aide, en 1983, son mari à gérer un hôtel-restaurant. Elle remplit ses heures de loisirs, en s’activant auprès des lépreux, des malades, des handicapés, des prisonniers. Elle diffuse, à des centaines de milliers d’exemplaires, des images et des prières au Père Laval. Des frères spiritains malgaches et mauriciens animent un foyer Père-Laval. Elle les aide de toutes ses forces féminines. Soutenue par les autorités épiscopales malgaches, elle travaille à l’achèvement de la construction d’une église qui sera dédiée à l’Apôtre de Maurice. En 1983, il ne reste que les bancs et les vitraux à mettre en place.

Elle voulait ardemment se faire religieuse. La mort d’un frère et la maladie de sa mère en décident autrement. Elle renonce à sa vocation religieuse pour s’occuper de sa mère. Plus tard, elle se mariera et prouvera à tous, comme à elle-même, qu’une femme mariée, gérante d’hôtel et de restaurant, peut se dévouer aux autres et surtout aux pauvres, autant que le plus actif et le plus dévoué des meilleurs religieux. Pour elle, tout cela est d’une simplicité enfantine. En cas de doute, elle se met à genoux et prie : qu’aurait fait le bon Père Laval à ma place ? Qui d’entre nous aura le courage de suivre son exemple ? Mais pourquoi exiger autant d’héroïsme de notre part ?

Article publié le Lundi 22 septembre 2008, dans l'EXPRESS

9/16/2008

Pèlerinage au caveau du Bienheureux Père Laval

Mgr Piat : Anou konfie Per Laval sa misyon anver bann paran

Cette année encore, les rues de Ste-Croix ont été envahies de personnes venues de toute l’île, rendre hommage au Père Laval et se recueillir à son caveau. Non seulement un moment fort du calendrier liturgique, mais aussi un rendez-vous important pour bon nombre de Mauriciens, au-delà des confessions religieuses et des appartenances ethniques.

C’est une marée humaine impressionnante qui a déferlé pendant la majeure partie de la nuit du 8 au 9 septembre dans les rues de Ste-Croix. Des personnes qui, comme un seul homme, se sont mises en marche, certaines depuis très tôt et venant de loin, en direction du caveau du Père Laval. En main, bougies et bouquets de fleurs.

Deux lieux, deux ambiances

Si les abords de la rue principale avaient un petit quelque chose de ‘Food fair’, reste à saluer le sens du partage et de la solidarité de tous ceux qui avaient choisi, pour l’occasion, d’offrir farata, roti, gateaux et jus aux pèlerins.

Tel l’élan d’unité et de solidarité ressenti lors des prestations sportives de Stéphane Buckland, Eric Milazar et tout récemment Bruno Julie, ce fut la nation mauricienne qui était présente à Ste-Croix. Tant du côté de ceux qui ravitaillaient les pèlerins que de ceux venus se recueillir.

La forte présence policière a aussi aidé à rendre l’atmosphère plus sécurisante, donnant ainsi un ton de fête familiale à la soirée du 8. Il était en effet pas rare de croiser des enfants campés sur les épaules de leurs papas. Et nombreux étaient ceux qui avaient fait le déplacement en famille.

L’allée Père Laval offrait une ambiance tout à fait différente de la route principale, l’accès ayant été interdit aux marchands ambulants et autres. Ainsi régnait en ces lieux un certain calme et recueillement, en partie aidés par la présence de haut-parleurs diffusant des cantiques et des prières.

Eucharistie, un grand moment

S’appuyant sur le thème du pèlerinage, «Mersi Per Laval, tonn transmet nou to lafwa», Mgr Piat a longuement cité le père Laval en exemple : celui qui a révélé aux Mauriciens l’amour de Dieu pour tous, celui qui a cru en la capacité de ce peuple de transmettre la flamme de l’amour de Dieu, celui qui n’a pas fait de distinction de race et de couleur,… Une flamme qui malheureusement aujourd’hui s’ébranle. «Legliz santi ki laflam ki nou finn resevoir li an danze akoz tou kalite koudvan ; lamod, sexialite, lalkol, ladrog, zougader,…Mo kone zordi boukou pe vinn ici pou dir Per Laval ed zot sanz zot lavi.»

Mgr Piat a aussi profité de l’occasion pour dire combien il partage les tracas et les peines des parents. Ces adultes, responsables de conduire leurs enfants sur la route de la vie, mais qui sont de plus en plus démunis face à l’adversité de la société d’aujourd’hui.

Il invite donc le peuple chrétien à s’appuyer sur la manière de faire du Père Laval pour être également apte à transmettre la flamme. Ainsi, a-t-il rappelé que «Per Laval finn kontan bann paran (…) finn kompran zot, pran zot kont, (…) li finn abandonn boukou kitsoz pou vinn Moris, (…) li finn viv seki li prese», et enfin, «li ti ena enn gran konfians dan seki Zezi dir li».

Ainsi, l’évêque a invité les fidèles à «kontan paran, ekout zot e pa kritik zot». Aux parents, ils les encouragent à mettre leurs pas dans ceux du Père Laval, à accepter d’abandonner certaines choses, à se sacrifier. «Ena enn gran fri ki sort ladan.»

Il a aussi encouragé les fidèles à marcher avec le Père Laval. «Zordi si nou le transmet nou lafwa, nou bizin kapav dir ; vini zot va trouve», et à convaincre en étant convaincus car, pour le père Laval, «sitan li konvaincu, boukou dimoun finn suiv-li».

Mgr Piat devait conclure en invitant l’assemblée à «konfie Per Laval sa gran misyon anver bann paran. Sa gran travay ki Zezi finn konfie nou.» Et garder la flamme vivante, transmettre l’amour de Jésus, c’est «leritaz a transmet a nou zeness, nou zanfan».

Recueillement prolongé

La messe terminée, la foule a continué à se masser à l’intérieur du caveau. Une attente qui pour certains a duré plusieurs dizaines de minutes tellement il y avait de fidèles. Ce recueillement s’est poursuivi durant toute la nuit. Alors que d’autres, fatigués par une longue marche, étendus ici et là dans la cour de l’église, se sont laissé aller à une petite somme sous les étoiles.

Martine Théodore-Lajoie, La Vie Catholique

Du bon …

Le pèlerinage au tombeau du Père Laval ce 8 septembre 2008 s’est déroulé dans une meilleure ambiance de prière et de recueillement que les années précédentes. Il faut s’en réjouir et féliciter les organisateurs d’avoir pris des décisions qui auront favorisé cette ambiance propice à un pèlerinage qui est un chemin de méditation sur le témoignage du saint.

J’ai trouvé moins de marchands dits ambulants, moins d’éclats de voix. Les trois messes à 18h, 20 h et 22h 30 et l’abolition de celle de minuit fait partie d’un ensemble qui permet aux pèlerins de prier à des heures raisonnables pour être mieux en forme pour le travail du lendemain. Il faut ajouter une certaine baisse dans la fréquentation de la marche, probablement à cause de l’insécurité. Ce n’est pas mauvais : seuls les plus convaincus prennent la route et on évite la tendance triomphaliste que prennent certains pèlerinages.

Je voudrais aussi exprimer une gêne que j’éprouve en tant que pèlerin devant le reportage de Radio One sur sa distribution de bouteilles d’eau. Je m’interroge sur les vrais motifs de cette proximité affichée avec les fêtes religieuses. J’ai entendu une personne interviewée en trois occasions, louer la radio en question pour les bouteilles d’eau, comme quoi ça lui donne du courage pour marcher. A aucun moment le journaliste ne s’intéresse à la démarche religieuse. De sorte qu’avec l’impact que la radio peut avoir, l’auditeur ne perçoit du pèlerinage que la campagne de distribution d’eau. J’ai ressenti la même gêne pendant le dernier pèlerinage de Maha Shivaratree.

Jean-Maurice Labour, La Vie Catholique

9/10/2008

PÈRE LAVAL - Messe à Sainte-Croix hier

L'évêque invite les parents à accorder du temps à leur famille

Mersi Per Laval, tonn transmet nou to la foi. Conformément au thème choisi cette année pour le pèlerinage en hommage au Père Laval, l'évêque de Port-Louis, Mgr Maurice Piat, s'est appesanti sur l'importance pour les parents d'abandonner un peu leurs distractions et de prendre le temps d'être à l'écoute de leur famille. La "flamme", symbole de foi et de valeurs telles que transmises par le Père Laval, est " en danger ", dit-il. C'était lors d'une messe hier soir, à l'occasion de l'anniversaire de la mort de l'apôtre des pauvres.

Comme pour ne pas déroger à la coutume du 8 septembre, soit la veille de l'anniversaire de la mort de celui dont on fêtera l'an prochain les trente ans de béatification, les pèlerins mauriciens sont venus nombreux une fois de plus se recueillir à son tombeau, déposant fleurs et bougies sur le caveau. Nombreux étaient ceux, par ailleurs, qui ont assisté à la messe présidée par l'évêque de Port-Louis à l'extérieur de l'église.

Certains avaient marché, d'autres étaient venus en bus et d'autres encore en voiture. Mais, tous étaient venus prier celui qui comme l'a décrit l'évêque, " ti enn papa ki ti ena bokou lafeksion me osi ki ti kapav dir nou fran ki nou pese ".

Pourquoi les Mauriciens aiment-ils tant se rendre au tombeau du Père Laval, se rassembler et se rappeler ce qu'il a réalisé pour les Mauriciens ? C'est par cette question qu'il dit se poser à lui-même chaque année que l'évêque a débuté son homélie. " Je crois que nous, Mauriciens, nous aimons le Père Laval parce qu'il nous a montré, à travers sa parole et son exemple que Dieu aime ses enfants à Maurice, même les plus rejetés, les plus dan pins. Le Père Laval nous a montré que nous avons nous aussi la capacité de transmettre la flamme ". Le Père Laval, poursuit-il, a choisi, à son époque, des Mauriciens et Mauriciennes simples mais avec un grand cœur. " Il leur a fait confiance, les a formés, leur a confié des responsabilités, les a catéchisés et les a encouragés à l'entraide sociale. Ils ont pu construire des chapelles partout à travers Maurice. Il leur a donné des missions comme s'occuper des malades ". L'évêque devait citer plusieurs noms dont Emilien Pierre, Jean-Marie Prosper, Edouard Labelle etc. C'est grâce à ces personnes, dit-il, qui ont cru dans le Père Laval, que la flamme de la foi a pu se transmettre de génération en génération.

Aujourd'hui, toutefois, devait-il souligner, " nous sentons que cette flamme que nous avons reçue depuis l'époque du Père Laval à travers nos prêtres, nos parents et familles, est en danger. Il y a toutes sortes de coups de vent - manières de vivre - qui sont en train de détruire notre vie, voulant éteindre la flamme, par exemple la drogue, la pornographie, les relations sexuelles bonavini, lavi zougader, l'infidélité ".

L'évêque a dit rencontrer nombre de parents inquiets, qui ne savent plus comment s'y prendre pour transmettre à leurs enfants les valeurs qu'ils ont eux-mêmes reçues. " Le Père Laval a aimé les parents. Aimons les parents ". Mgr Piat a raconté avoir une fois rencontré un père de famille, qui après son travail, aimait aller " anba la boutik boir enn tigit, zoue domino e dam e rant lakaz tar ". Un jour, poursuit l'évêque, alors qu'il regardait un sketch sur l'abandon des enfants par leurs parents, le père de famille en fut si touché qu'il n'eut plus envie de jouer aux dominos et de rentrer tard chez lui. Il décida de s'occuper de son enfant. " L'autre jour, je l'ai rencontré et il m'a dit que non seulement, son enfant a réussi à son HSC mais a décroché un diplôme de France. Cela montre que quand un parent accorde de l'attention à son enfant, il y a de grands fruits qui en sortent ". Il devait citer un autre exemple d'une mère de famille dont les enfants faisaient chacun une activité séparément. Un jour, elle décida qu'au moins une fois par semaine, toute la famille devait dîner ensemble. " Il y a une grande valeur dans le partage. Le partage de notre vie, nos joies, nos peines."

Pour Mgr Piat, " la flamme ne se transmettra pas automatiquement. Il faut prendre le temps d'écouter, d'abandonner un peu ses distractions et accorder de l'attention à votre famille ".

Le Mauricien

9/09/2008

Le Père Laval, l'apôtre de tous les pauvres

Qu'est-ce qui pousse les catholiques, et les Mauriciens en général, à converger vers le tombeau du Père Jacques Désiré Laval, à Sainte-Croix, tout le long de l'année, et plus particulièrement le 9 septembre ? La pertinence de l'apôtre des pauvres, de tous les pauvres faut-il désormais dire, puisque comme il est dit dans notre savoureux créole, "dan so kafe pati ena triaz", est en effet plus que jamais de mise.

Venu à Maurice en 1841, ce médecin d'Evreux, petite bourgade de la campagne française, ne retournera pas sur le sol natal, ayant donné son corps et son âme à ce Christ qui l'avait guidé sur le chemin de la Vérité. Il avait pourtant connu la vie mondaine, le père Laval. Mais il délaissera le confort de son pays pour venir évangéliser ses "chers Noirs", comme il est écrit dans une biographie qui lui est consacrée dans les archives du Vatican. "Devenu prêtre, je pourrai faire plus de bien", disait-il à son frère.

Il entra au séminaire de l'église Sainte-Sulpice, dans le sixième arrondissement, à Paris, et devint curé de la paroisse de Pinterville. «Il partageait tout son avoir avec les indigents. Mais en apprenant la misère des Noirs d'Afrique et l'urgence de les amener au Christ, il obtint de partir à l'île Maurice, avec le vicaire apostolique, Mgr Collier. Durant 23 ans, jusqu'à sa mort, il consacra tout son temps, usa toutes ses forces, donna tout son c?ur à l'évangélisation des autochtones: sans jamais se lasser il sut les écouter, les catéchiser, leur faire découvrir leur vocation chrétienne. Souvent aussi il intervint pour améliorer leur condition sanitaire et sociale.»

Le Père Laval fait aujourd'hui partie du patrimoine religieux catholique et mauricien. Béatifié par le Vatican, il attend d'être sacré saint. Mais ici, dans ce pays spécial, où tant de gens «spéciaux» ont posé les pieds, de Mohandas Karamchand Gandhi à Mark Twain, en passant par Charles Darwin, V. S. Naipaul et Charles Baudelaire, pour ne citer que quelques-uns d'entre eux, l'itinéraire de Jacques Désiré Laval a de quoi interpeller.Homme du monde, il osa quitter l'étroitesse (dans tous les sens du mot) de son monde pour s'ouvrir aux autres. Mais bizarrement, quand on évoque les liens indéfectibles entre la France et l'île Maurice, on citera Surcouf, Mahé de Labourdonnais et tant d'autres. Mais le nom de Jacques Désiré Laval ne sera jamais cité en premier. Comme s'il fallait à tout prix escamoter l'aura d'un homme, dont la seule «faute» aura été de faire des Noirs, longtemps considérés comme «biens meubles», ses frères.

«Le fait est que notre missionnaire a laissé derrière lui d'innombrables convertis, à la foi et à la piété solides», lit-on dans sa biographie. Des gens de toutes communautés se pressent en effet aux pieds de son tombeau. Le tomba-liste Vel, de foi tamoule, aux Salines, érigea un autre monument au saint homme, à côté du cimetière de l'Ouest, le Père Laval ayant rendu la parole à sa fille muette. Ses miracles ne se comptent plus, et personne ne s'aviserait de nier ses qualités d'homme de Dieu. Serge Lebrasse, notre «tcholo» national, lui consacra d'ailleurs un séga. Une de ces odes qui traversent le temps. Et qui, «à l'exemple du Père Laval, encourage tous ceux qui, sur le continent africain et ailleurs, s'efforcent de bâtir un monde fraternel, exempt de préjugés raciaux !»Les gouvernements qui se sont succédé à l'hôtel du gouvernement ont compris cela, les décideurs et les lords-maires de la capitale, ayant tout fait pour que le pèlerinage du Père Laval reste un rendez-vous, un point de rencontre de la foi et du c?ur, pour tous les Mauriciens. En cela, ils prolongent tous, politiciens d'hier et du jour, le sacerdoce de Jacques Désiré Laval pour l'avènement d'un monde où tous les hommes seraient frères !

Le matinal

9/08/2008

Pinterville 2008



Des pèlerins au tombeau du Père Laval


Ils seront nombreux cette année encore à effectuer le pèlerinage au tombeau du bienheureux Père Laval à Sainte Croix. Ce traditionnel pèlerinage qui se déroule dans la nuit du 8 au 9 septembre aura pour thème cette année : ' Mersi Père Laval tonn transmet nou to la foi'. Outre les Mauriciens de toutes communautés confondues venus des quatre coins du pays, on doit s'attendre à la participation des Mauriciens établis à l'étranger et des étrangers venant plus particulièrement de l'île de la Réunion.

Considéré comme l'apôtre des Noirs, le Père Laval deviendra au fil des années le symbole de l'unité intercommunautaire de Maurice. D'abord médecin puis curé de campagne en Normandie, le Père Jacques Désiré Laval fut, pendant les vingt-trois dernières années de sa vie, missionnaire à l'île Maurice, auprès des esclaves affranchis. Il fut béatifié par le Pape Jean-Paul II le dimanche 29 avril 1979, en la Basilique de Saint-Pierre de Rome.

PÈRE LAVAL : messe ce soir à Sainte-Croix

" Mersi Père Laval, tonn transmet nou to lafoi. " Ce thème, qui a trait à la transmission des valeurs telle que développée dans la lettre de carême de l'évêque de Port-Louis, a été cette année choisi pour la célébration de la messe à l'occasion de l'anniversaire de la mort du Père Laval.

En avril prochain, l'Église de Maurice célébrera les trente ans de béatification du Père Laval. " Par sa vie, autant que par ses paroles, il a montré à tous les hommes qu'ils ont de la valeur aux yeux de Dieu. Aujourd'hui, c'est à notre tour de faire savoir aux hommes et aux femmes de notre temps leur valeur aux yeux de Dieu ", selon la cure de Sainte-Croix.

La messe de ce soir, à Sainte-Croix, sera célébrée à 20 h 30 par l'évêque de Port-Louis, Mgr Maurice Piat. Demain, mardi, 9 septembre, une autre messe sera célébrée au même lieu, à 10 h, par le père Jocelyn Grégoire.

Les pèlerins pourront assister à d'autres célébrations à Sainte-Croix du 8 au 28 septembre.
Ci-dessous, le programme :

- Lundi 8 septembre : 18 h (intérieur de l'église) : Philippe Goupille ;
: 20 h 30 : Messe par l'évêque de Port-Louis
: 22 h 30 (intérieur de l'église) : père Renniers
: 19 h-02 h : animation par le Renouveau charismatique sur la place de l'Église.

- Mardi 9 septembre : messes à 6 h ; 8 h ; 10 h (père Grégoire) ; 12 h (père Laurent Rivet) ; 14 h (père Sunassee) ; 16 h et 18 h (père Richard).

- Jeudi 11 septembre : messe à 9h.

- Samedi 13 septembre : 9 h à 15 h - pèlerinage des handicapés.

- Dimanche 14 septembre : messes à 11 h (père Mongelard) ; 13 h ; 15 h ; 17 h (père Zimmerman).

- Dimanche 21 septembre : messes à 11 h (père Nalletamby) ; 13 h et 15h.

- Dimanche 28 septembre : messes à 11 h (père Hym) et à 14 h (père Dorai Raj)

Le prêtre toujours adulé


Si la religion les sépare parfois, chrétiens, musulmans et hindous se retrouvent autour d'un événement : le pèlerinage du Père Laval. Il se déroule demain dimanche à Pinterville et doit rassembler, comme chaque année, plusieurs centaines de personnes, dont de très nombreux Mauriciens. Une messe en plein air est célébrée à 11 heures par l'évêque d'Evreux, Christian Nourrichard. Un pique-nique est ensuite ouvert à tous.

La célébrité de Jacques-Désiré Laval tient de son parcours. Né le 18 septembre 1803 à Croth, dans la vallée de l'Eure, il est le quatrième enfant d'une famille de fermiers, qui vit dans une foi profonde. Sa mère, qu'il perd à l'âge de 7 ans, marquera profondément sa vie. Il parle d'elle comme d'une femme « si bonne envers les pauvres ».« Faisons ce que nous pouvons, Dieu fera le reste »

Pourtant, la foi et les faibles n'entrent pas tout de suite dans sa vie. Jacques-Désiré Laval suit des études classiques à Paris, devient médecin en août 1830, exerce à Saint-André-de-l'Eure et Ivry-la-Bataille. La vie lui sourit et il délaisse la pratique religieuse.

C'est l'approche des pauvres n'ayant pas les moyens de se soigner qui le fait basculer dans une autre vie.Le médecin entre au séminaire de Saint-Sulpice à Paris et est ordonné prêtre le 22 décembre 1838. Il arrive à Pinterville l'année suivante, pour y rester deux ans. Deux ans seulement qui vont profondément marquer la commune.Mais déjà, le Père Laval se sent appeler pour une autre mission : partir loin. Il devient donc missionnaire dans la Congrégation du Saint-Esprit et c'est l'île Maurice qui l'accueille en septembre 1841. L'esclavage vient d'y être aboli, les nouvelles libertés des ex-esclaves les désorientent et le prêtre va les traiter comme ses frères, leur rendant leur dignité d'hommes. Il apprend aussi leur langue, rédige un catéchisme en créole, les soigne, les regroupe en communauté chrétienne. L'humble missionnaire devenu l'apôtre des Mauriciens meurt le 9 septembre 1864. Parce qu'il n'a jamais fait de différence entre les races et les religions, si nombreuses à l'île Maurice, il reste encore aujourd'hui vénéré par tous. Il a été déclaré Bienheureux par le pape Jean-Paul II en avril 1979.

TEMOIGNAGE - Sans foi ni loi

Si, parmi les vieilles nations catholiques qu'étaient la France, l'Espagne et le Portugal, le dévouement du Père Laval n'était pas un cas unique, certains ecclésiastiques, en revanche, n'étaient pas taraudés par le scrupule en ce qui concerne l'évangélisation, comme nous le démontre l'exemple suivant. En effet, l'on peut citer le témoignage, parmi certains documents de l'époque où l'Angola était sous l'occupation portugaise, le cas d'un certain vicaire général qui baptisait tous les esclaves, sans la moindre instruction préparatoire ni examen préalable de leurs dispositions : il en était d'ailleurs incapable puisqu'il ignorait la langue du terroir, le kikongo. La raison de ce zèle ? Le vicaire en question était rémunéré pour chaque baptême qu'il donnait. Et l'évêque Emmanuel Baptiste, qui signala cet abus à Rome, estima néanmoins qu'il fallait le tolérer, puisque cette activité était la principale si non l'unique ressource du curé.

Le Mauricien

APOSTOLAT - Les pères fondateurs de la Congrégation du Saint-Esprit

L'on considère généralement que la Congrégation du Saint-Esprit, à laquelle a appartenu le Père Laval, a eu deux fondateurs, à 140 ans de distance. En effet, elle fut fondée en 1703 puis revivifiée en 1848, par la fusion avec la Société du Saint-Cœur de Marie.

En 1703, Claude Poullart des Places, (1679-1709) jeune aristocrate breton, ordonné prêtre après avoir renoncé à une carrière au Parlement de Rennes, regroupe des étudiants pauvres désireux d'être prêtres et de servir dans des paroisses pauvres. Ainsi naissent la Société et le séminaire du Saint-Esprit, qui sera, dès1816, chargé de fournir le clergé de toutes les colonies françaises. En 1841 François Libermann, né dans une famille juive, fils du rabbin de Saverne, converti au catholicisme, fonde la Société du Saint-Cœur de Marie. Son but est l'apostolat auprès des Noirs d'Afrique et auprès des Esclaves devenus libres dans les Îles de Saint-Domingue (Haïti) et de Bourbon (La Réunion).

En 1848, la Société fondée par Libermann regorge de vocations mais n'a pas de statut juridique précis. Celle de Poullart des Places existe officiellement mais est à bout de souffle. Or, les buts des deux Congrégations sont très voisins. Les membres de la Société du Saint-Cœur de Marie entrent dans la Congrégation du Saint-Esprit qui devient ainsi l'héritière d'une double tradition, riche des intuitions communes de ses deux fondateurs. Aujourd'hui, particulièrement développée en Afrique, la congrégation missionnaire du Saint Esprit compte plus de 3 000 spiritains, dont 745 Français, 550 Irlandais, 270 Hollandais, 310 Nigérians, 180 Portugais dans 55 pays.

Notons que les évêques de Port-Louis et des Seychelles, les Mauriciens Maurice Piat et Denis Wiehe, sont, tous deux, spiritains.

LE TEMPS D'UN PÈLERINAGE

Du Père Laval et de l'évangélisation des affranchis à Maurice et Bourbon

Le 9 septembre prochain, plusieurs milliers de Mauriciens prendront la route de Sainte-Croix, pour le pèlerinage au tombeau du Père Laval, dont ce sera le 144ème anniversaire de la disparition. Cette popularité posthume du Bienheureux Laval - qui pourrait être canonisé dans quelques années - est due, on le sait, à son œuvre évangélisatrice, à Maurice, surtout parmi la population des anciens esclaves, qui avaient été affranchis deux ans auparavant par les autorités britanniques.

C'est en 1841 que débarque à Port-Louis, sans bagages, après plus de trois mois de traversée, et dans l'anonymat le plus total, un prêtre du nom de Jacques Désiré Laval, en provenance de Normandie. Sans expérience, et premier missionnaire de la Congrégation du Saint Esprit fondée il y a peu, il est néanmoins chargé de la Mission des Noirs. Il vit retiré dans un petit pavillon de bois, dans la cour du presbytère où il reçoit les affranchis, ébahis de s'entendre appelés " Monsieur " ou " Madame ", et à l'intention desquels il dit, le dimanche, une messe qui leur est spécialement destinée. Portant une soutane élimée et voyageant à dos d'âne, il rend visite aux membres de la communauté des Noirs, dans leurs huttes, à l'hôpital et à la prison, en s'adressant à eux dans leur créole qu'il s'est mis à apprendre. Bientôt, il fait construire de petites écoles de brousse et des centres de prière à travers le pays, et au bon fonctionnement desquels il veille, sans relâche.

D'abord seul, puis secondé par d'autres missionnaires, le Père Laval, également médecin avant d'être prêtre, va guérir et remettre debout, physiquement et moralement, tout un peuple que les nantis considèrent comme marginal. Plus les succès augmentent, plus l'opposition de ces derniers croît. La haine des plus riches vaut au curé de Ste-Croix le surnom de " la grosse bête noire ", alors qu'il devra assurer ses instructions du soir sous la protection de deux policiers. Cependant, au fur et à mesure, l'attitude des Blancs va évoluer vers la confiance et même, pour certains, vers un profond sentiment d'admiration. Mieux, à la longue, sa patience et son abnégation verront la réconciliation et la conversion des oppresseurs par les opprimés, soit celles des maîtres par leurs anciens esclaves.

En 1852, après onze années d'évangélisation et de "travail social" avant la lettre, le Père Laval est nommé supérieur provincial des missions de Bourbon et de Maurice. N'ayant pas fait de noviciat, connaissant mal les règles de la vie religieuse et, de plus, répugnant à rédiger des rapports, il vivra mal cette nomination. Néanmoins, lors des épidémies de choléra et de variole, en 1854 et 1856 respectivement, il se dévouera à l'extrême pour les malades et les mourants. Après sa mort, à la suite de plusieurs attaques d'apoplexie, en septembre 1864, quelque 40 000 personnes escorteront son cercueil jusqu'à sa dernière demeure, au pied du calvaire, devant l'église de Ste-Croix.

Code noir

Si, à Maurice, la mission du Père Laval fut un exemple sacerdotal, ailleurs, en haut lieu, et hors du clergé, loin même de contenir ne serait-ce qu'une once de spiritualité, les motivations des politiques en faveur de l'évangélisation, souvent, ne manquaient pas de cynisme. En effet, élément essentiel dans les sociétés coloniales françaises du XIXe siècle, la traite était considérée comme une " chance " pour les asservis de pouvoir entendre l'évangile, l'évangélisation devenant l'élément justificateur de l'esclavage. Le Code Noir de 1723 est très clair à ce sujet et demande, dès le premier article, de faire instruire dans la religion catholique, apostolique et romaine et de faire baptiser tous les esclaves, qui étaient donc, ainsi, tenus d'assister à tous les offices religieux. Mais en réalité, dans la pratique, cet article du Code Noir n'était pas vraiment observé par les maîtres qui, non seulement, faisaient souvent travailler les esclaves le dimanche, ces derniers ne pouvant donc se rendre à l'office dominical, alors que ces mêmes maîtres, parfois, ne faisaient pas baptiser leurs esclaves. Et quand ils le faisaient, leur observation du Code Noir se limitait, en tout et pour tout, à quelques rites pour toute une vie, tels que la première communion et les funérailles. Par ailleurs, après l'Abolition, les anciens esclaves apprentis souhaitant se faire quelques sous, n'ayant que le dimanche pour s'y consacrer, il était difficile, voire impossible de les convaincre de renoncer à ces travaux dominicaux, pour se rendre à la messe.

A l'île Bourbon

Outre le cas de la messe dominicale, l'évangélisation n'allait pas dans le sens des intérêts des maîtres qui, dès lors que leurs esclaves étaient baptisés, ne pouvaient plus vendre séparément les conjoints ou ne voulaient pas permettre à une esclave de quitter l'habitation pour suivre son mari. Ainsi les maîtres condamnaient-ils souvent leurs esclaves à vivre en concubinage - et par la même dans le "péché" - et à l'impossibilité d'être baptisés. Par ailleurs, la plupart des documents écrits datant de l'époque de l'esclavage témoignent de l'état de corruption indéniable du climat de la moralité parmi les colons mauriciens et réunionnais, ce qui ne jouait pas en faveur de l'évangélisation. Néanmoins, à La Réunion, selon un témoignage de l'évêque, Mgr Solages, les Noirs voyaient les ecclésiastiques comme étant les "docteurs" des Blancs et, d'autre part, comme chefs de la religion dominante dans le monde. Et Mgr Solages, partant du schéma selon lequel les maîtres, d'habitude, servent de modèles et d'initiateurs, souhaitait que le comportement des Blancs démontre la " suprématie " du catholicisme. Or, comme nous l'avons vu plus haut, le comportement en question était loin d'être conforme à son souhait.

Malgré le marasme religieux dans lequel était plongée l'île, certains ecclésiastiques se sont véritablement préoccupés de la situation et de l'évangélisation des esclaves. Et loin d'être les complices naïfs ou hypocrites d'un catholicisme fort de son monopole, la congrégation des Lazaristes, par exemple, ayant perçu le lien complexe liant catholicisme et religion des maîtres blancs, s'interrogea sérieusement sur la signification des conversions opérées parmi les esclaves. En 1840, l'arrivée à La Réunion du Père Monnet, qui coïncide avec un lent processus d'émancipation, résulte en une nouvelle approche d'évangélisation et de christianisation. Le nouvel arrivé s'attache à l'instruction des esclaves et fait de la Rivière-des-Pluies le centre de sa mission itinérante.

Le rapide succès qu'obtient le Père Monnet à La Réunion permet de vérifier son hypothèse selon laquelle l'adhésion au catholicisme transforme les esclaves. Les maîtres le félicitent et lui témoignent leur reconnaissance, parce que leurs esclaves qui fréquentent le catéchisme " ne sont plus voleurs et travaillent bien ", dit-il. Ce curé que l'on surnomme " tambour-major des prêtres de la colonie " est convaincu de ce que la moralisation ne peut aboutir sans un passage par l'émancipation, pensant aussi que les Noirs sont tout à fait capables de devenir d'excellents sujets. L'Histoire lui donnera d'ailleurs raison puisque l'Abolition de l'esclavage n'entraînera aucune révolution motivée par la vengeance envers les anciens maîtres.