9/09/2008

Le Père Laval, l'apôtre de tous les pauvres

Qu'est-ce qui pousse les catholiques, et les Mauriciens en général, à converger vers le tombeau du Père Jacques Désiré Laval, à Sainte-Croix, tout le long de l'année, et plus particulièrement le 9 septembre ? La pertinence de l'apôtre des pauvres, de tous les pauvres faut-il désormais dire, puisque comme il est dit dans notre savoureux créole, "dan so kafe pati ena triaz", est en effet plus que jamais de mise.

Venu à Maurice en 1841, ce médecin d'Evreux, petite bourgade de la campagne française, ne retournera pas sur le sol natal, ayant donné son corps et son âme à ce Christ qui l'avait guidé sur le chemin de la Vérité. Il avait pourtant connu la vie mondaine, le père Laval. Mais il délaissera le confort de son pays pour venir évangéliser ses "chers Noirs", comme il est écrit dans une biographie qui lui est consacrée dans les archives du Vatican. "Devenu prêtre, je pourrai faire plus de bien", disait-il à son frère.

Il entra au séminaire de l'église Sainte-Sulpice, dans le sixième arrondissement, à Paris, et devint curé de la paroisse de Pinterville. «Il partageait tout son avoir avec les indigents. Mais en apprenant la misère des Noirs d'Afrique et l'urgence de les amener au Christ, il obtint de partir à l'île Maurice, avec le vicaire apostolique, Mgr Collier. Durant 23 ans, jusqu'à sa mort, il consacra tout son temps, usa toutes ses forces, donna tout son c?ur à l'évangélisation des autochtones: sans jamais se lasser il sut les écouter, les catéchiser, leur faire découvrir leur vocation chrétienne. Souvent aussi il intervint pour améliorer leur condition sanitaire et sociale.»

Le Père Laval fait aujourd'hui partie du patrimoine religieux catholique et mauricien. Béatifié par le Vatican, il attend d'être sacré saint. Mais ici, dans ce pays spécial, où tant de gens «spéciaux» ont posé les pieds, de Mohandas Karamchand Gandhi à Mark Twain, en passant par Charles Darwin, V. S. Naipaul et Charles Baudelaire, pour ne citer que quelques-uns d'entre eux, l'itinéraire de Jacques Désiré Laval a de quoi interpeller.Homme du monde, il osa quitter l'étroitesse (dans tous les sens du mot) de son monde pour s'ouvrir aux autres. Mais bizarrement, quand on évoque les liens indéfectibles entre la France et l'île Maurice, on citera Surcouf, Mahé de Labourdonnais et tant d'autres. Mais le nom de Jacques Désiré Laval ne sera jamais cité en premier. Comme s'il fallait à tout prix escamoter l'aura d'un homme, dont la seule «faute» aura été de faire des Noirs, longtemps considérés comme «biens meubles», ses frères.

«Le fait est que notre missionnaire a laissé derrière lui d'innombrables convertis, à la foi et à la piété solides», lit-on dans sa biographie. Des gens de toutes communautés se pressent en effet aux pieds de son tombeau. Le tomba-liste Vel, de foi tamoule, aux Salines, érigea un autre monument au saint homme, à côté du cimetière de l'Ouest, le Père Laval ayant rendu la parole à sa fille muette. Ses miracles ne se comptent plus, et personne ne s'aviserait de nier ses qualités d'homme de Dieu. Serge Lebrasse, notre «tcholo» national, lui consacra d'ailleurs un séga. Une de ces odes qui traversent le temps. Et qui, «à l'exemple du Père Laval, encourage tous ceux qui, sur le continent africain et ailleurs, s'efforcent de bâtir un monde fraternel, exempt de préjugés raciaux !»Les gouvernements qui se sont succédé à l'hôtel du gouvernement ont compris cela, les décideurs et les lords-maires de la capitale, ayant tout fait pour que le pèlerinage du Père Laval reste un rendez-vous, un point de rencontre de la foi et du c?ur, pour tous les Mauriciens. En cela, ils prolongent tous, politiciens d'hier et du jour, le sacerdoce de Jacques Désiré Laval pour l'avènement d'un monde où tous les hommes seraient frères !

Le matinal

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