9/08/2008

Père Laval : quand le pèlerinage prend une dimension nationale


On peut à la fois vénérer Sai Baba et rendre visite au tombeau du Père Laval. Pour Anerood, Satish, Vicky et Kuvin, ce n’est nullement incompatible.

«Distribuer des boissons aux pèlerins marchant vers le Grand-Bassin ou aux fidèles cheminant vers le tombeau du Père Laval, pour moi, c’est pareil. Dans les deux cas, l’important c’est d’être au service des autres». Pour Kuvin Jeewood, responsable des relations publiques au sein du Nicolay Kalimata Mandir, c’est une conviction profonde.

Pourtant, ce jeune homme à la parole facile, revient de loin. Adolescent, il chantait à la chorale du collège anglican de Saint-Andrews. Mais cela ne l’empêchait pas d’être athée. «Mo komplike sa mem mo pa gagn tifi pou marie». Aujourd’hui, il ne ménage pas son temps au service du temple. Organisation de débats, leçons gratuites en mathématiques, «parce que je suis ingénieur», distribution de verres de jus le soir du pèlerinage en mémoire du Père Laval.

Un bienheureux qu’il découvre grâce à une tante établie en Angleterre. En vacances à Maurice, elle l’emmène au tombeau et lui achète un livre sur la vie du Bienheureux. «Mon premier livre», soupire-t-il. Tout démarre avec le pèlerinage à Grand-Bassin. «J’ai d’abord marché pour le fun, mais j’ai découvert les difficultés des gens. Leurs sacrifices. Je crois qu’il y a un message commun à toutes les religions. C’est le service».

Vicky Parianen sera lui aussi aux abords des rues, durant la nuit du 8 au 9 septembre. Cet auditeur des comptes âgé de 28 ans, aurait pu rester tranquillement chez lui, à préparer son anniversaire, qui coïncide avec la commémoration de la mort du Père Laval. A la place, avec ses amis du Nicolay Kalimata Mandir, association du temple situé à la route Nicolay à Port-Louis, le trésorier distribuera des verres de «paanakkon», boisson à base de jus de tamarin et de limon, habituellement distribuée lors des cérémonies tamoules, aux pèlerins.

Dans sa famille, aller au tombeau ce jour là, «est une tradition». Un passage obligé d’où il revient, «avec le sentiment du devoir accompli». Son premier souvenir du pèlerinage date de ses huit ans. A l’époque, il est un enfant « de santé fragile», que ses parents amènent au tombeau.

« Il est guéri maintenant », intervient l’énergique secrétaire de l’association, Satish Gungaram. A 50 ans, cet Office Attendant au Sugar Planters’ Mechanical Pool n’a rien oublié de ses tracas d’enfance : les examens. Sa dévotion pour le Père Laval remonte à cette période-là. « Quand j’étais à l’école et que c’était la période des examens, on allait chercher la bénédiction du Père Laval, même si on n’avait rien appris pendant une année», se souvient-il avec une douce ironie. Pour Satish Gungaram, le Père Laval est un symbole de paix. Un ciment entre les gens de toutes confessions. « Je ne connais pas sa vie, mais j’ai entendu dire que c’est l’apôtre des pauvres», sourit-il derrière sa barbe blanche. «Vous savez, c’est comme le slogan de l’ICAC, l’ICAC pa get figir. La pauvreté c’est pareil. Li pa get figir».

Il laisse la parole à Aneerood Basant, aussitôt interrompu par une sirène de police. C’est la sonnerie du téléphone portable de ce chef de la sécurité chez IBL. Comme pour ses amis de l’association, son lien avec le Père Laval remonte à l’enfance. L’époque où il vivait avec ses huit frères et sœurs sur la propriété sucrière de The Mount. Une ombre passe sur son visage. C’est le souvenir de sa mère, «une femme très croyante», qui, face à un problème familial, venait prier à Sainte-Croix en emmenant avec elle tous les enfants. «En grandissant, c’est resté. Maintenant, quand j’ai un problème et que je vais au tombeau, je me sens plus léger après».

Pour Anerood, Jacques-Désiré Laval était plus un guérisseur qu’un prêtre. Il ramènera donc chez lui le bouquet qui aura effleurer le tombeau pour le placer à côté de l’effigie de Jésus et des divinités hindoues, qui trônent dans sa salle de prière.

Il troque volontiers sa casquette de président du Roche Bois Sai Devotional Group, avec contre celle du dévot de Père Laval. « La mission de Sai Baba et celle du Père Laval correspondent. D’ailleurs, quand je suis allé en Inde à Puttarpati là où vit le Sai Baba, j’ai vu plein de non-dévôts qui sont sortis de là transformés. Pourquoi pas nous ? »

L'EXPRESS

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