2/26/2007

1803 – 1864 : Jacques Désiré Laval

Jacques-Désiré naquit à Croth le 18 septembre 1803, dans le département de l’Eure en France, diocèse d’Evreux. A la suite d’études brillantes de 1817 à 1825, il fut reçu au diplôme de médecine en 1830 à Paris et commence à exercer dans une petite ville de sa Normandie natale. Après un revirement intérieur et sur un désir fort d’être prêtre, il entrait au séminaire Saint-Sulpice à Paris le 15 juin 1835.

Jacques-Désiré fut ordonné prêtre à 33 ans par Monseigneur de Quélen, évêque d’Evreux ; c’était le 2 décembre 1838. Nommé curé dans le village de Pinterville, de 1839 à 1841, deux traits le caractérisent déjà : sa charité et son esprit de prière. Il donnait au pauvre de son nécessaire et passait, chaque jour, des heures à genoux devant le Saint Sacrement. C’est là qu’il ressenti l’appel des missions lointaines.

A l’occasion de la naissance de l’Oeuvre des Noirs, qui a pour créateurs Libermann, Tisserant et Le Vavasseur, Monseigneur Collier, alors Vicaire Apostolique de Maurice, de passage à Paris en 1840, sollicita l’Abbé Laval pour se consacrer à cette œuvre missionnaire. Reçue comme un signe de la Providence, Jacques-Désiré Laval accepta immédiatement cette offre. Arrivé par le bateau Tanjore et accompagné de Mgr Collier, Jacques-Désiré, âgé de 38 ans, débarqua à Port-Louis le 14 septembre 1841. Commencent alors 23 années d’évangélisation, tout d’abord en paroisse. L’Abbé Laval ne devait commettre aucun faux pas à cause du risque de l’expulsion au moindre déplaisir de l’autorité britannique.

Il étudie le créole pour être, dans un premier temps, plus proche des prisonniers vers qui l’envoie Mgr Collier. Chaque jour, il y enseigna la prière et la doctrine chrétienne, et eut à accompagner plusieurs fois des condamnés à mort à l’échafaud.

Dans un deuxième temps, son souhait le plus cher allait être exaucé : son évêque lui confie l’évangélisation des Noirs, des plus défavorisés, des affranchis, soit 80 000 âmes. De 1841 à 1846, il accomplit seul cette charge. Le ressort de son zèle missionnaire résidait dans sa sainteté. Il était réputé pour son don d’instruire et de convaincre. Sa pastorale était bâtie sur 4 piliers : les catéchistes ; les petites communautés de base ; l’apostolat des Noirs par les Noirs ; des lieux pour le culte. Plus d’un siècle avant Vatican II, l’Abbé Laval invitait chaque chrétien à faire Eglise en étant fidèle à la grâce de leur baptême. Cette pastorale porta ses fruits et connut un grand essor avec l’aide d’autres prêtres spiritains arrivés en 1846 qui adoptèrent la méthode ‘lavalienne’. Il fut aussi le fondateur de la chrétienté rodriguaise.

Il rédigeât un Petit Catéchisme à l’usage des catéchistes et un Précis complet de la Doctrine chrétienne par demandes et par réponses d’une pédagogie exceptionnelle. Grâce à son enseignement, beaucoup de chrétiens formés se voient confiés la tâche de catéchistes. Les petites communautés de base ne cessent de grandir et les lieux deviennent trop exigus. Tombolas et fêtes sont organisées pour financer les travaux d’agrandissement et de construction de nouvelles églises.

La vie donnée du Père Laval se termina le 9 septembre 1864, à l’âge de 61 ans. Il fut enterré à Sainte-Croix selon son souhait. L’Abbé Jacques-Désiré Laval fut Béatifié par le Pape Jean-Paul II à Rome le 22 octobre 1978, dimanche des Missions, onze ans avant sa visite pontificale à Maurice.

2/12/2007

Le dernier adieu à l'Abbé Pierre

« Je venais d’être nommé évêque de Port-Louis quand l’Abbé Pierre nous a honorés d’une brève visite à Maurice. Durant ce séjour, l’Abbé Pierre nous a donné une belle leçon de vie et de persévérance. L’homme nous a émus par son ardeur au combat et sa compassion à l’égard des « cabossés de la vie », comme il disait. Défenseur infatigable des sans-logis, il a inauguré l’abri de nuit de Port-Louis. Je me rappelle encore de son humour communicatif à cette occasion : il était très amusé qu’on appelait les clochards à Port-Louis des « tontons ». Il nous a rappelés qu’en France, le terme « Tonton » faisait référence au Président Mittérand !
L’Abbé Pierre est également celui qui nous a donné l’idée de lancer ce qu’il a appelé un « Relais Espérance ». Cette initiative a pour but d’accueillir les familles qui n’ont pas de logis jusqu’à ce qu’elles trouvent un logement décent. L’Abbé Pierre insistait qu’il ne fallait pas maintenir les sans-abris dans un état de dépendance, mais les aider à profiter de logements sociaux mis à leur disposition par l’Etat.

Les campagnes et actions menées par l’Abbé Pierre en faveur des plus démunis de la société redonnent à la foi chrétienne toute sa pertinence dans le monde d’aujourd’hui. L’Abbé Pierre apporte un puissant témoignage de la force de la foi qui conduit à l’engagement social. C’est cela qui est à la source de son rayonnement international. A Maurice, l’Abbé Pierre avait eu ces paroles très vraies : « on ne peut parler de Dieu à quelqu’un qui n’a pas, au-dessus de sa tête, un toit pour l’abriter contre les intempéries et les aléas de la nature ».

Il ne faut pas que la mort de l’Abbé Pierre soit la fin de son combat. Le parcours de cet homme exceptionnel doit sans cesse nous interpeller et nous inviter à regarder avec lui dans la même direction, celle des pauvres. Comme dans une famille, la qualité de vie d’une société se mesure à l’attention qu’elle porte aux plus pauvres.

Je terminerais en citant l’Abbé Pierre : « La première beauté d’une ville n’est ni ses cathédrales, ni ses lieux de cultes : elle est de ne pas avoir de famille sans travail, sans logement, sans faim ».

+ Maurice E. Piat
Evêque de Port-Louis