8/02/2005

Hommage à l'abbé Masuy

Dans l'île Maurice de la seconde moitié du XIXe siècle, le mouvement religieux commencé au sein des Noirs ne tarda pas atteindre aussi les Blancs, les milieux fortunés et les classes dirigeantes de l’époque. En effet, les premiers missionnaires des Blancs furent les Noirs, et d’abord les vieux domestiques fidèles qui eux-mêmes eurent une influence positive sur leurs maîtres.
L’apostolat du Père Laval prépara celui du Père Masuy, arrivé en juin 1845 avec deux autres prêtres. L’abbé Masuy, originaire de Belgique et ami du Père Laval contribua à ce changement, comme aussi les autres curés de qualité des paroisses, sous l’impulsion de leur évêque. Des liens forts unissaient le Père Masuy, apôtre de la population blanche de l’époque, au Père Laval, parce que ce dernier considérait que « Blancs et Noirs sont les fils d’un même Père ». C’est propre au Père Laval de ne pas opposer les gens, mais de faire sauter les barrières, entre classes, entre races.

La Congrégation des Sœurs du Bon et Perpétuel Secours fut fondée par Mgr Collier et le Père Masuy. Pendant les longues absences du Père Masuy, c’était le Père Laval qui les guidait. Le Père Laval fondait de telles structures de secours et aimait les animer. Il faut dire que le bon Père inspirait un dévouement inlassable, lui qui allait régulièrement de grabat en grabat dans les abris provisoires et savait trouver les paroles appropriées pour consoler les pauvres.

A cette période, un missionnaire français de passage à Maurice rencontra l’abbé Masuy :
- Montrez-nous, dit-il à l’abbé Masuy, ce Père Laval dont on parle tant dans votre île. J’avais à Saint-Sulpice un condisciple de ce nom.
- Il était aussi de Saint-Sulpice et ce doit être lui !
- Mais savez-vous alors que vous avez un saint parmi vous ? C’était notre distributeur d’aumônes et il y mettait une charité qui faisait notre édification. Un jour, par un froid rigoureux, l’abbé Laval remplissait tout grelottant sa charge journalière ; se présente un pauvre mal vêtu, transi de froid ; le serviteur de Jésus-Christ n’hésite pas, il jette sur les épaules du malheureux son manteau dont il se dépouille et continue sous une bise aiguë ses saintes fonctions.
En ce moment parut le Père Laval :
- Tenez, dit l’abbé Masuy, le voici qui vient à nous dans toute sa gravité et sa sérénité.
- Ah ! vraiment, c’est là ce pauvre Jacques, c’est ce gaillard-là, ajouta-t-il dans sa langue simple et franche.
La reconnaissance allait se faire, mais le Père Laval, devinant le sujet de la conversation des deux prêtres devint invisible : son humilité s’était alarmée et jamais les deux amis ne se revirent.

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